Au procès du 13-Novembre, François Hollande défend sa "guerre" contre l'Etat islamique

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Par Anne-Sophie LASSERRE et Marie DHUMIERES - Paris (AFP)
Publié le 10 novembre 2021 - 01:45
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L'ancien président François Hollande (c), entouré de l'ancien ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve (g) et de l'ex- premier ministre Manuel Valls (d), près du Bataclan, à Paris le 14 novembre 2015
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© Miguel MEDINA / AFP/Archives
L'ancien président François Hollande (c), entouré de l'ancien ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve (g) et de l'ex- premier ministre Manuel Valls (d), près du Bataclan, à Paris
© Miguel MEDINA / AFP/Archives

"On nous a fait la guerre, nous avons répondu": entendu comme témoin au procès sous haute sécurité des attentats du 13 novembre 2015, l'ancien président François Hollande a justifié mercredi sa politique étrangère au Moyen-Orient et répondu aux polémiques.

Droit à la barre de la cour d'assises spéciale de Paris, costume sombre sur chemise blanche, François Hollande a raconté son 13-Novembre et explicité les décisions prises "lors de cette nuit funeste", mais aussi celles des mois qui l'ont précédée et suivie.

Dans une salle d'audience comble, l'ex-chef de l'Etat promet de "répondre à toutes les questions" des parties civiles, notamment sur d'éventuels ratés des autorités et l'incapacité de la France à déjouer un attentat de grande ampleur.

Assurant "(mesurer) la souffrance des victimes" et comprendre "leur demande de vérité", le témoin - cité par l'association Life for Paris, partie civile - certifie: "Hélas, nous n'avions pas l'information qui aurait été décisive pour empêcher les attentats".

Depuis les attaques de janvier 2015, "chaque jour nous étions sous la menace. Nous savions qu'il y avait des opérations qui se préparaient, des individus qui se mêlaient aux flux de réfugiés, des chefs en Syrie. Nous savions tout cela", développe François Hollande.

"Mais nous ne savions pas où, quand et comment ils allaient frapper", insiste-t-il à plusieurs reprises.

Sans un regard vers le box des accusés à sa gauche, l'ancien président de la République répond aux explications du principal accusé, Salah Abdeslam, qui a justifié au début du procès les attentats comme une riposte à l'intervention militaire française en Syrie.

"On nous a fait la guerre et nous avons répondu", martèle François Hollande.

L'Etat islamique "nous a frappés non pas pour nos modes d'action à l'étranger, mais pour nos modes de vie ici-même", souligne encore François Hollande, pour qui "la démocratie sera toujours plus forte que la barbarie".

- "Essayez de m'écouter" -

A l'aise devant la cour, il rappelle que les frappes françaises en Syrie n'ont débuté que le "27 septembre" 2015 - "ce qui veut dire que le commando s'était préparé bien avant", soutient-il.

Poussé par la défense de Salah Abdeslam à s'expliquer plus en profondeur sur l'intervention militaire française contre l'Etat islamique, François Hollande finira pourtant par montrer un certain agacement. "Est-ce que les frappes françaises ont pu causer des victimes collatérales en Syrie et en Irak ?", demande Olivia Ronen. "Quel est le sens de votre question ?", répond M. Hollande.

"Vous voulez établir un lien entre ce que nous faisons et les attaques", insinue le témoin, qui dit ne pas avoir "eu connaissance de victimes collatérales". Me Ronen le relance : "Donc, il n'y a pas eu de victimes collatérales ?"

L'ex-président perd patience. "Essayez de m'écouter", "je ne peux pas être plus précis (...) nous faisons en sorte qu'il n'y en ait jamais".

Largement questionné par la défense sur la stratégie de la France au Moyen-Orient, François Hollande grince encore : "En fait, les avocats de la défense sont dans la politique internationale et pas dans la politique pénale".

Le nom de l'ancien président était revenu plusieurs fois depuis le début du procès le 8 septembre, et dans la bouche même des jihadistes du Bataclan : un enregistreur laissé dans la salle de spectacle avait capté toute l'attaque et les revendications des assaillants.

"Vous ne pouvez vous en prendre qu'à votre président François Hollande", entend-on plusieurs fois, entre deux tirs, dans cet extrait diffusé fin octobre devant la cour.

- "Une signature, un message" -

"Avez-vous écouté cette bande audio, comment l'avez-vous vécu ?", demande à l'ex-chef de l'Etat l'avocat de Life for Paris, Me Jean-Marc Delas.

"Cela ressemblait à une espèce de refrain, comme si c'était une signature", commente François Hollande. "Un message" pour nous "faire renoncer à nos interventions en Irak et en Syrie" et pour que "s'installe une rupture, une guerre de religion" entre les Français.

Le fait que son nom soit prononcé dans les revendications l'a "fait réfléchir à (sa) propre responsabilité", souligne François Hollande.

Mais, affirme-t-il, l'air grave: "Je ferais exactement la même chose" aujourd'hui. "Je le dis devant les parties civiles qui souffrent, ceux qui ont perdu des êtres chers", continue-t-il. "C'est la France, nous le devions aux populations qui se faisaient massacrer".

Au terme de près de quatre heures d'audition, le président de la cour Jean-Louis Périès remercie l'ancien président de la République. Dans le box, Salah Abdeslam se lève, mais le magistrat intervient immédiatement : "Non, non M. Abdeslam, si vous avez des questions, vous passez par vos conseils". Le principal accusé se rassoit. Fin de l'audience, qui reprend mardi avec les auditions de chercheurs et universitaires.

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