Le Sénat rejette une proposition de loi visant à faciliter le déclenchement du référendum

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Lauriane Bernard, France-Soir
Publié le 24 novembre 2023 - 11:40
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Philippe Bas Sénat RIP
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Ludovic Marin / AFP
“Devoir mobiliser 48 millions d’électeurs parce qu’un million d’entre eux a décidé qu’un sujet devait être soumis au vote des français est une démarche qui me pose un problème", a commenté le sénateur LR Philippe Bas.
Ludovic Marin / AFP

FRANCE - Mercredi 22 novembre, le Sénat a rejeté la proposition de loi visant à faciliter le recours du référendum d’initiative partagée (RIP). Malgré un contexte de forte abstention électorale et dans lequel le Parlement vit au rythme du 49.3, il semblerait que la Chambre haute ne soit toujours pas prête à lâcher du lest à la démocratie directe. 

Ce jeudi 23 novembre, Elisabeth Borne a déclenché pour la 18e fois l’article 49 alinéa 3 de la Constitution. L’abstention aux dernières élections présidentielles française enregistre un chiffre record de 28,01 %. Pire encore, le premier tour des élections régionales de 2021 a été boudé par pas moins de 66,7 % d’électeurs. 

C’est dans ce contexte de grande défiance populaire que le sénateur Yan Chantrel, membre du groupe socialiste, écologiste et républicain (SER) a suggéré au Parlement un texte qui facilite un peu la représentation du citoyen dans la vie démocratique. C’était sans compter le rejet de 224 sénateurs sur 326 suffrages exprimés.

Une proposition pour faciliter le référendum

Depuis 2008, il est effectivement possible de soumettre une proposition de loi directement au vote populaire. Néanmoins, le mécanisme prévu à l’article 11 de la Constitution répond à des conditions tellement strictes qu’il n’a encore jamais vu le jour. La proposition de texte défendue par Yan Chantrel entendait donc apporter quelques modifications pour rendre le processus plus flexible. 

Ainsi, le sénateur proposait d’élargir le champ du référendum à la question fiscale et aux lois qui ne sont pas uniquement des réformes, d’abaisser les seuils de signatures de parlementaires et de soutiens d’électeurs requis pour mettre en œuvre le RIP, de créer un deuxième type de référendum proposé directement par les citoyens (et non plus seulement par le président de la République ou par les parlementaires), et enfin, d’imposer la tenue d’un RIP lorsqu’une proposition de loi n’a pas été rejetée expressément par les deux chambres du Parlement. 

Comparées au régime actuel, toutes ces propositions avaient au moins le mérite de laisser penser que l’organisation d’un référendum ne relevait plus de l’hypothèse improbable.

Aucun RIP n’est allé au bout du processus 

Car à l’heure actuelle, pour déclencher la procédure du RIP, un cinquième du Parlement, soit 185 parlementaires, doit appuyer la proposition, ainsi que 4,7 millions d’électeurs inscrits sur les listes. Ensuite, les domaines sur lesquels les parlementaires ont la possibilité d’interroger le peuple concernent uniquement “l’organisation des pouvoirs publics, la politique économique, sociale ou environnementale ou la ratification d'un traité international". Pour finir, la proposition de loi sur laquelle porte le RIP doit à tout prix constituer une réforme.

Autant dire qu’à ce jour, aucun des cinq projets de RIP n'est allé au bout du processus. En 2020, à propos du statut des aéroports de Paris, le Conseil constitutionnel avait constaté que le seuil nécessaire de soutien populaire n’était pas atteint. Plus récemment, sur l’épineuse question de l’âge de départ à la retraite, il l’a encore écarté pour des raisons purement formelles, en considérant que la réforme des retraites n’était pas vraiment une réforme. 

Et pourtant, les arguments avancés par le groupe socialiste, écologiste et républicain (SER) pour en finir avec ces situations de blocage n’ont pas convaincu le Sénat, à commencer par le rapporteur de la commission Phillipe Bas (LR). 

Les activistes et les groupes de pression inquiètent

“Devoir mobiliser 48 millions d’électeurs parce qu’un million d’entre eux a décidé qu’un sujet devait être soumis au vote des français est une démarche qui me pose un problème", a-t-il commencé par avouer en séance publique. “Pour recueillir un million de signatures, il suffit qu’un groupe de pression armé de militants, voire d’activistes, se mobilisent, faisons très attention !” 

Il n’est pas certain non plus qu’il faille banaliser le référendum : "Faut-il privatiser l’aéroport de Paris ? Si vous posez la question aux Français, êtes-vous sûre de recueillir plus de 10 ou 15 % de participation ? C’est le meilleur moyen de tuer le RIP !”

Enfin, il s’est inquiété que la proposition de loi ne laisse pas plus de place à l’examen du Conseil constitutionnel, celui-là même qui a rejeté quatre propositions de RIP sur cinq depuis 2008...

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