Retraites : le Premier ministre dévoile son plan, la fronde s'amplifie

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Par Lucile MALANDAIN - Paris (AFP)
Publié le 11 décembre 2019 - 08:59
Mis à jour le 12 décembre 2019 - 09:27
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Laurent Berger, le secrétaire général de la CFDT
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Fin des régimes spéciaux, âge d'équilibre à 64 ans, entrée dans le système à partir de la génération née en 1975: le Premier ministre a détaillé mercredi son projet de réforme des retraites, faisant immédiatement basculer le camp syndical réformiste, CFDT en tête, dans la mobilisation, au 7e jour d'une grève amenée à se renforcer.

"Il n'y aura ni vainqueur ni vaincu" avec la réforme, a affirmé Édouard Philippe devant le Conseil économique, social et envemental (Cese).

Mais sitôt le plan dévoilé, la fronde syndicale a gagné une recrue de poids: la "ligne rouge est franchie", a tonné, courroucé, Laurent Berger, le secrétaire général de la CFDT, hostile à l'allongement de la durée de cotisation via la mise en place d'un "âge d'équilibre".

"Ma porte est ouverte, ma main est tendue", lui a répondu Édouard Philippe au Sénat.

"Je suis ferme sur le principe (...) d'un système qui concernera tout le monde", mais "je ne suis pas fermé et j'ai indiqué à l'ensemble des organisations (patronales) et syndicales qu'il y avait toute une série de points sur lesquels nous pouvions améliorer la réforme", a-t-il abondé quelques heures plus tard sur TF1.

Pas de quoi atténuer la colère du premier syndicat français: à l'issue d'un bureau national, la CFDT a appelé "l'ensemble des travailleurs à se mobiliser le 17 décembre", date prévue par les opposants à la réforme pour la prochaine mobilisation. Sur le plateau de France 2, Laurent Berger a demandé au gouvernement de "revenir en arrière" sur "l'âge d'équilibre", qu'il a qualifié de "gros problème".

La CFTC a aussi appelé à se mobiliser mardi prochain. Le 17 décembre, "il n'y aura que le Medef qui ne sera pas en grève", a commenté le numéro un de la CGT Philippe Martinez.

Selon le projet du gouvernement, l'âge légal restera à 62 ans, avec "un âge d'équilibre" progressivement amené à 64 ans et "un système de bonus-malus".

Comme la CFDT, l'Unsa a dénoncé une "ligne rouge".

"Que ça réagisse, on le savait. Mais est-ce qu'on pouvait décemment présenter quelque chose sans parler d'équilibre financier ?", a commenté un membre du gouvernement.

Retraite minimum garantie à 1.000 euros et "85% du SMIC dans la durée", possibilité de partir deux ans plus tôt pour les personnes exerçant des métiers usants, niveau de pension des enseignants "sanctuarisé", majoration de 5% dès le premier enfant figurent parmi les mesures présentées. Avec le fait que les Français nés avant 1975 "ne seront pas concernés par la réforme" et que la génération "qui aura 18 ans en 2022" sera "la première à intégrer le système universel".

Les partenaires sociaux fixeront la valeur du point "sous le contrôle du Parlement", a assuré le Premier ministre. "La loi prévoira une règle d'or pour que la valeur du point acquis ne puisse pas baisser", avec une indexation sur les salaires.

- "Renforcer la grève" -

La disparition des régimes spéciaux est confirmée mais, "pour les fonctionnaires et les agents des régimes spéciaux dont l'âge légal" de départ est de 52 ans, en particulier les conducteurs de la SNCF et de la RATP, la réforme s'appliquera à partir de la génération 85, a précisé Matignon.

Pour le Premier ministre, "les garanties données" justifient que la grève "s'arrête".

C'est au contraire à "renforcer la grève" qu'a appelé Laurent Brun, le secrétaire général de la CGT-Cheminots, premier syndicat de la SNCF, tandis que Bruno Poncet (SUD-Rail) "pense qu'on va dans le mur, que ça va durcir le mouvement". A la RATP, l'Unsa (1er syndicat) a appelé à "installer la mobilisation dans la durée".

Les prévisions de trafic pour jeudi sont quasi inchangées par rapport à mercredi: un TGV et un Transilien sur 4 à la SNCF, 10 lignes du métro parisien fermées.

Et le mécontentement déborde largement le secteur des transports: le Conseil des barreaux votera des actions ce vendredi, et les principaux syndicats policiers menacent de "durcir" leur mobilisation. Les syndicats d'enseignants de la FSU ont appelé à la reconduction de leur mobilisation.

"Je reste dans le camp des opposants", a déclaré de son côté François Hommeril (CFE-CGC), dénonçant une réforme "de plus en plus dangereuse".

Côté politique, l'opposition de gauche comme de droite a rejeté la réforme, "injuste" pour Jean-Luc Mélenchon (LFI) et Yannick Jadot (EELV), "régressive" pour Olivier Faure (PS). A droite, Guillaume Peltier (LR) a dénoncé "un enfumage", Marine Le Pen (RN) une réforme "terrible".

C'est une première depuis 23 ans: les partis de gauche ont tenu mercredi soir un meeting commun sur les retraites, à Saint-Denis, à l'initiative du PCF. Tous ont souhaité l'abandon pur et simple d'un projet gouvernemental jugé "injuste", promettant que la mobilisation allait s'amplifier.

Le patron du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux, a au contraire salué "un bon équilibre entre une réforme qui est redistributive" et le fait qu'"il faut, quand c'est possible, qu'on travaille plus longtemps".

Le projet de loi gouvernemental sera prêt "à la fin de l'année", soumis au Conseil des ministres le 22 janvier et discuté au Parlement fin février.

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