Nicaragua : Ortega poursuit son offensive contre l'opposition et les médias indépendants

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Par Julia RIOS - Managua (AFP)
Publié le 23 décembre 2018 - 00:08
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Photo de la façade du siège de la chaîne 100% Noticias prise la 22 décembre 2018 à Managua au lendemain de sa fermeture par le régime de Daniel Ortega
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© MAYNOR VALENZUELA / AFP
Photo de la façade du siège de la chaîne 100% Noticias prise la 22 décembre 2018 à Managua au lendemain de sa fermeture par le régime de Daniel Ortega
© MAYNOR VALENZUELA / AFP

Le régime de Daniel Ortega et de son épouse et vice-présidente Rosario Murillo a poursuivi avant Noël son offensive contre l'opposition et les médias indépendants au Nicaragua, avec notamment l'arrestation du directeur d'une chaîne de télévision accusé de "conspiration" et de "terrorisme".

Arrêté vendredi soir, le journaliste Miguel Mora, patron de la chaîne d'informations 100% Noticias, était harcelé et menacé depuis plusieurs semaines. Il a été mis en accusation et écroué samedi.

La directrice de l'information de la chaîne, Lucia Pineda, qui a la double nationalité nicaraguayenne et costaricienne, a également été arrêtée. La journaliste Veronica Chavez, épouse de Miguel Mora, a été arrêtée mais libérée au bout de quelques heures.

- "Coups de pied"-

Vendredi soir, "une quarantaine de policiers anti-émeutes armés ont fait irruption" dans les locaux de 100% Noticias "en donnant des coups de pieds, en nous ordonnant de nous mettre à terre", a raconté Veronica Chavez.

Aucun média officiel n'avait rapporté cette information samedi après-midi.

Dans un communiqué, le parquet a indiqué que Miguel Mora était accusé d'avoir "incité à la haine et à la violence", des faits constituant une "provocation, incitation et conspiration à commettre des actes terroristes".

Tandis que l'accès au siège de 100% Noticias continuait d'être interdit par la police, Miguel Mora a été conduit en prison après sa comparution au palais de justice, menotté dans le dos et vêtu d'un uniforme bleu de prisonnier, encadré par des policiers cagoulés et armés de fusils.

Les autorités judiciaires lui ont refusé l'assistance d'un avocat, a dénoncé le juriste Pablo Cuevas, de la Commission permanente des droits de l'homme(CPDH). Le parquet a assuré de son côté que les "droits de la défense avaient été garantis".

Cette arrestation est le dernier épisode d'une vaste offensive du pouvoir depuis début décembre contre les organisations des droits de l'homme, les opposants et les médias critiques du gouvernement du couple présidentiel.

Les locaux du site d'information internet Confidencial, dirigé par le journaliste Carlos Fernando Chamorro, ont été mis à sac la semaine dernière et sont occupés par la police depuis lors. Par ailleurs, le Parlement a retiré la personnalité juridique à neuf ONG de défense des droits de l'homme.

Accusés d'"ingérence", les fonctionnaires de deux missions de la Commission interaméricaine des droits de l'Homme (CIDH) ont été expulsés jeudi, à la veille de la publication d'un rapport accablant accusant le pouvoir nicaraguayen de "crimes contre l'humanité".

La mise en accusation pour la première fois d'un journaliste pour les mêmes chefs d'accusation --"terrorisme" et "conspiration"-- imputés aux manifestants contre le régime constitue une nouvelle escalade dans la répression des manifestations d'opposition qui ont éclaté le 18 avril avant d'être écrasées dans le sang au début de l'été.

Depuis huit mois, les troubles ont fait plus de 320 morts, tandis que plus de 600 manifestants ont été jetés en prison, dont plus de la moitié ont déjà été condamnés à de lourdes peines pour "terrorisme". Une nouvelle loi qui réprime les manifestations contre le régime prévoit des peines pouvant aller jusqu'à 20 ans de prison.

- Indignation internationale -

Le président costaricien Carlos Alvarado, dont le pays sert de refuge à des dizaines de milliers de Nicaraguayens en exil, a "déploré l'escalade de la répression contre la presse", samedi dans un tweet.

La vague de répression contre les ONG, opposants et médias indépendants a suscité l'indignation internationale et la condamnation du Haut commissariat de l'ONU pour les droits de l'homme.

La presse écrite n'est pas non plus à l'abri des représailles du régime : le quotidien populaire Q'Hubo a dû suspendre sa parution vendredi, faute de pouvoir acheter encre et papier.

Le quotidien La Prensa a de son côté annoncé samedi que le gouvernement l'empêchait d'acheter papier et encre, ainsi que des pièces détachées pour la maintenance de ses rotatives.

"De toute façon, l'information est diffusée et continuera de l'être : notre site internet a deux millions de visiteurs uniques chaque mois", a souligné le directeur de La Prensa, Hugo Holmann. "C'est une méthode que nous avons déjà vu à l'oeuvre dans le cas du Nacional, au Venezuela, qui a été ainsi contraint d'arrêter sa publication imprimée".

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