“Pression”, absentéisme “alarmant”, accidents du travail en hausse : les conditions de travail des employés d’Amazon France épinglées par un rapport

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France-Soir
Publié le 17 octobre 2023 - 10:40
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Bryan Angelo / Unsplash
Amazon ne stabilise pas son personnel dans les entrepôts, 9 salariés du groupe sur 10 ayant moins de 5 ans d’ancienneté.
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Amazon France est sous le feu des critiques. Un rapport missionné par le comité social et économique (CSE) du groupe accable la filiale française du géant américain d’e-commerce. Hausse des accidents du travail, absentéisme “alarmant”, turn-over “important” et, selon les salariés, “pratiques illégales” et “pression"... Les conditions de travail chez Amazon France Logistique (AFL) sont encore épinglées par le CSE. Les pratiques de la firme détenue par Jeff Bezos font l’objet de critiques récurrentes, au même titre que d’autres entreprises GAFAM (Google, Apple, Facebook, Microsoft).

Le rapport, élaboré par le cabinet indépendant Progexa pour le CSE (instance qui représente le personnel de la société Amazon France Logistique, NDLR) s’attarde sur de nombreuses pratiques sociales dans les entrepôts comme au siège de la filiale française d’Amazon. Le document met particulièrement l’accent sur le nombre d’accidents avec arrêts de travail, qui est passé de 482 cas en 2021 à 1 132 cas en 2022…

38% des départs sont des licenciements

Cette augmentation a provoqué à son tour la hausse du taux d’absentéisme, qui est passé à 15,9 %. Un seuil “alarmant” pour Progexa, qui précise que 91% de ces cas d’absentéisme “s’expliquent par des arrêts maladie”.

Amazon rencontre aussi des difficultés à “stabiliser” son personnel dans les entrepôts, puisque neuf salariés sur dix ont moins de cinq ans d’ancienneté. Le taux de rotation (turn-over) est à 36 %, ce qui signifie que le personnel est renouvelé dans son intégralité tous les trois ans. Preuve d’une difficulté à retenir ses employés, les départs dits “naturels” chez Amazon, comme la retraite ou la mutation, sont très peu représentés (3%).

A l’opposé, la rupture des contrats à durée indéterminée (CDI) était plus fréquente en 2022 : 31 % des départs sont survenus durant la période d’essai, 38 % des cas étaient des licenciements, 25 % des cas étaient des démissions et 3 % des ruptures conventionnelles. Des salariés interrogés par la presse ont expliqué ces chiffres par “la pression managériale” et “l’impératif de résultat”.

La situation des employés n’est pas nouvelle. Le CSE avait déjà tiré la sonnette d’alarme en mars 2022, dénonçant à cette époque une “précarisation de la rémunération", une "parité injuste" mais surtout une "intensification de la charge de travail". AFL était accusée de vouloir "ne conserver, à terme, que des postes pénibles”.

Le constat du cabinet Progexa dans son rapport a déjà été observé en octobre 2022 aux États-Unis. Un document interne au géant américain, dévoilé par la presse, révélait que deux tiers des salariés quittaient l'entreprise au bout de trois mois. Un salarié a deux fois plus de chances de quitter l'entreprise de sa propre initiative que d'être licencié.

Le document commandé par le CSE a fait réagir Amazon. “Nous offrons à nos plus de 20 000 salariés en France un environnement de travail sûr et moderne”, a affirmé un porte-parole du groupe à l’AFP. Il cite un “sondage indépendant réalisé par l’Ifop en 2023” selon lequel “plus de 8 salariés d’Amazon sur 10 s’y projettent dans les prochaines années et recommanderaient à leurs proches de venir y travailler”.

Une taxe sur le bénéfice de 15 % minimum à partir de 2024

Le porte-parole rappelle également que son employeur a investi plus de 25 millions d’euros en 2022 en France “dans l'amélioration de la sécurité et le bien-être de ses salariés sur les sites logistiques”.

Les “pressions” et les “impératifs de résultats” évoqués par les salariés ne leur seraient pas uniquement imposés par leurs managers mais également par un système de surveillance et de collecte de données liées à la productivité. En septembre, la CNIL (Commission nationale de l'informatique et des libertés), qui enquêtait depuis quatre ans, a requis une amende de 170 millions d’euros contre Amazon pour des pratiques soupçonnées d’être contraires au règlement général sur la protection des données.

Les préoccupations soulevées chez Amazon France s'inscrivent dans un contexte plus large de débats et de controverses liées aux pratiques de certaines grandes entreprises technologiques, notamment les autres membres des GAFAM. A peine un mois avant le rapport de Progexa sur Amazon, les employés français d’un autre géant de la tech, Apple, ont fait grève pour réclamer de “meilleures conditions de travail” et une revalorisation salariale.

Lorsqu’il ne s’agit pas des conditions de travail ou des licenciements, c’est la contribution de ces géants du numérique à la fiscalité qui est remise sur la table. Apple, Google et leurs compères, soumis depuis 2019 à la "taxe Gafa", sont toujours accusés de pratiquer une optimisation fiscale de manière à payer moins d’impôts.

La publication du rapport du CSE intervient deux semaines après l’annonce d’Amazon d’un chiffre d’affaires de 10,5 milliards d'euros en France en 2022. Une recette en hausse de 16 % par rapport à 2021.

Fin 2022, les pays membres de l‘UE ont trouvé un accord pour taxer, à partir de 2024, les bénéfices des multinationales à hauteur de 15% minimum dès lors que celles-ci réalisent plus de 750 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel. En attendant, la taxe française continuera de s’appliquer en 2023 et l’État s’attend à collecter 670 millions d’euros contre 591 millions d’euros en 2022.

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