"Le Chantier" : la radio qui ouvre la voie vers l'emploi

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Par Céline CASTELLA - Clermont-Ferrand (AFP)
Publié le 12 janvier 2022 - 01:23
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Charlotte Waelti (L) et Benoit Bouscarel (R), fondateurs de la radio "Le Chantier", posent à Clermont-Ferrand, le 5 janvier 2022
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© Thierry ZOCCOLAN / AFP/Archives
Charlotte Waelti (L) et Benoit Bouscarel (R), fondateurs de la radio "Le Chantier", posent à Clermont-Ferrand, le 5 janvier 2022
© Thierry ZOCCOLAN / AFP/Archives

"Bonjour, bienvenue sur la radio +Le Chantier+": Benjamin Bony, salarié en insertion et journaliste éphémère, accueille les auditeurs de Clermont-Ferrand au micro de ce média pas comme les autres qui utilise le journalisme pour faciliter la recherche d'emploi.

"En proposant à nos salariés de prendre la parole en public, de faire un travail de journaliste, on donne la possibilité de reprendre confiance en eux, avec cette fonction essentielle de l'humain, la voix", explique Benoît Bouscarel, ex-journaliste à France Culture à l'origine de ce projet associatif selon lui unique en son genre.

8H45: après le café, c'est l'heure de la conférence de rédaction quotidienne dans des locaux modernes et conviviaux, au rez-de-chaussée d'un immeuble du centre-ville.

Les journalistes, cinq salariés en insertion, déterminent le programme du jour, avec Angélique Mangon, encadrante et journaliste professionnelle.

Aujourd'hui, il faut deux volontaires pour un reportage dans une ferme urbaine: "Cela implique de préparer les questions ce matin et d'aller sur le terrain l'après-midi. C'est un peu speed mais c'est possible", dit-elle pour rassurer son auditoire.

Benjamin Bony, 34 ans, et Firoz Ahmed, un autre salarié de 43 ans, acceptent la mission.

Les voici sur les hauteurs de Clermont-Ferrand, arpentant un vaste potager au repos en cette période hivernale, avec vue imprenable sur la ville. Micro en main, derniers réglages: "soyez indulgent, le journalisme ce n'est pas notre métier de base!" prévient Benjamin Bony, face au responsable de la ferme.

Depuis son retour de Chine où il a passé dix ans, cet interprète et professeur de français peine à retrouver un emploi car son expérience n'est pas reconnue en France: "la radio m'apporte beaucoup: apprendre à parler en public, faire une interview, rédiger un rapport", détaille-t-il.

Firoz Ahmed a régularisé sa situation après avoir quitté le Bangladesh en 2016: avec son diplôme équivalent Bac+5 et son anglais impeccable, il vise un emploi de réceptionniste mais on lui reproche systématiquement son faible niveau de français.

Depuis son arrivée au Chantier, en novembre, ce père de famille a fait de sérieux progrès salués par toute l'équipe: "Avant j'étais timide, certains rigolaient de ma façon de parler, aujourd'hui je me débrouille... Parler français, c'est ma priorité", assure l'apprenti reporter, très impliqué.

La radio diffuse depuis janvier 2021, alternant programmation musicale et podcasts relayés sur son site internet.

- "Aller vers les autres" -

Deux tiers de la cinquantaine de salariés passés par Le Chantier ont retrouvé le chemin d'un emploi durable, à travers un contrat ou un diplôme, selon Benoît Bouscarel qui préside la structure.

Teddy Patin, 32 ans, vient de décrocher un contrat de six mois comme gestionnaire de paie dans un lycée, après plusieurs mois d'expérience radiophonique.

"La radio m'a donné confiance, m'a permis de mieux communiquer avec les autres, d'aller vers eux car j'étais très timide. Cela m'a aidé pour les entretiens, je suis plus à l'aise à l'oral, ça fait une sacrée différence au niveau de l'employeur", explique le tout nouveau vacataire, de passage dans les locaux où se cultivent les liens avec les anciens.

"C'est extrêmement intéressant de voir à quel point on arrive, avec ces actions, à lever les freins à l'emploi", souligne Benoît Bouscarel. Avec Charlotte Waelti, autre professionnelle de la radio, il a fondé en 2015 "l'Onde porteuse", association d'insertion à l'origine du Chantier.

Le reportage radio permet aussi de rencontrer des acteurs économiques et culturels pour réaliser des sujets autour de l'environnement, des solidarités, du social et de la culture.

Les contrats durent en moyenne treize mois et peuvent aller jusqu'à deux ans. L'idée n'est pas de former des journalistes mais de renforcer un projet professionnel dans l'hôtellerie, le maraîchage, le bâtiment, la culture, etc.

L'Etat prend en charge les salaires au niveau du Smic. Le reste est financé par le département, le mécénat, et les productions des salariés: podcasts, animations, prestations avec des partenaires locaux.

Et la petite association voit grand: fin 2021, l'Onde porteuse a été distinguée par la fondation "La France s'engage" présidée par François Hollande. A la clé, une dotation de 250.000 euros sur trois ans et un accompagnement pour créer dix autres rédactions "inclusives". La première est en cours d'installation à La Réunion.

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