Procès de Saint-Etienne-du-Rouvray : victimes et proches refusent la "haine" mais réclament la "justice"

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Par Amélie BAUBEAU - Paris (AFP)
Publié le 17 février 2022 - 15:10
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Au procès de l'attentat de Saint-Etienne-du-Rouvray, la sœur du père Hamel, assassiné dans son église, et Guy Coponet, grièvement blessé, ont assuré jeudi ne pas ressentir de "haine" mais ont souhaité que soient tirées les leçons d'éventuelles défaillances dans la prévention d'attaques jihadistes.

"Même avec ma grande souffrance qui persiste, comme celle de ma famille, vous n'aurez pas ma haine", a déclaré face au box des accusés Roseline Hamel, aujourd'hui âgée de 81 ans.

En l'absence des deux assaillants abattus par les forces de l'ordre, Adel Kermiche et Abdel-Malik Petitjean, et de l'instigateur présumé de l'attaque, le propagandiste du groupe Etat islamique Rachid Kassim, probablement mort en Irak, la cour juge depuis lundi trois membres de leur entourage.

Jean-Philippe Jean Louis, Farid Khelil et Yassine Sebaihia comparaissent pour "association de malfaiteurs terroriste". Ils sont soupçonnés d'avoir été au courant de la volonté des deux jeunes hommes de commettre une action violente, d'avoir partagé leur idéologie ou tenté de rejoindre la Syrie.

"Quand on pardonne pas, ça devient forcément de la haine, c'est invivable", a témoigné à la barre Guy Coponet, 92 ans.

Ce rescapé, que l'un des jihadistes avait tenté d'égorger, a expliqué plaindre les "jeunes qui se laissent embobiner" par les islamistes, tout en appelant à ce que "justice soit faite" et à "ne pas minimiser" la responsabilité des accusés.

"Nous nous reconstruisons par morceau, façon puzzle, pas besoin de vous dire que ça reste fragile. C'est pourquoi, monsieur le président, nous avons besoin de savoir des vérités cachées", a lancé Roseline Hamel.

- "Doute sur la sincérité" -

Elle a ajouté souhaiter que "s'il y a eu défaillance" dans "la protection qui doit être mise en place pour protéger les citoyens", cela "soit résolu afin que plus jamais nous ne connaissions cette horreur, cette barbarie, ces massacres".

Après l'attentat, les informations selon lesquelles les deux assassins étaient repérés par les services de renseignement (fichés S) et l'un d'eux porteur d'un bracelet électronique après deux tentatives de départ en Syrie avaient provoqué une vive polémique.

Farid Khelil, cousin d'Abdel-Malik Petitjean, a tenu à prendre la parole à deux reprises.

"Bouleversé par le témoignage de M. Coponet", il assure regretter de ne pas avoir fait "beaucoup plus (...) pour éviter que (son) cousin", qu'il avait hébergé, "arrive dans cette église".

L'accusé a ensuite demandé "pardon de cette négligence criminelle" à la sœur du prêtre.

"Vous avez dit: +vous n'aurez pas ma haine+. Vous avez mon amour", assure-t-il.

Ces "paroles me font beaucoup de bien", répond Roseline Hamel, qui émet toutefois "un doute sur (la) sincérité" de l'accusé.

Auparavant, plusieurs membres des familles Coponet et Hamel, ont fait le récit de la journée du 26 juillet 2016, faisant revivre la mémoire du prêtre et de Janine Coponet, qui assistait à la messe avec son mari et est décédée il y a quelques mois.

- "Satan, va-t-en !" -

"C'était le jour de mon anniversaire. Ce matin-là il faisait beau, le père Hamel (...) était gai parce qu'il allait partir en vacances", a raconté Guy Coponet, assis devant la barre.

Hormis lui et sa femme, seules trois religieuses assistaient à la messe.

Le paroissien a ensuite relaté l'irruption des jihadistes dans la petite église, puis l'agression du prêtre de 85 ans: Abdel-Malik Petitjean le force à s'agenouiller et lui assène plusieurs coups de couteau, pendant qu'Adel Kermiche oblige Guy Coponet à filmer la scène.

Jacques Hamel "s'est défendu comme il a pu, il repoussait de ses pieds" son agresseur, s'écriant "Satan, va-t'en !"

"J'ai vu que le sang s'est mis à vomir, tout rouge, il n'a plus bougé le pauvre, c'était terminé pour lui. C'était affreux", poursuit le vieil homme, comparant la souffrance du prêtre aux dernières heures de la vie du Christ.

Les deux hommes s'en prennent ensuite à lui, avec des coups sur "le dos, le bras", puis, dit-il, "ça s'est terminé par la gorge". Malgré la douleur, il fait le mort et comprime sa plaie pendant près d'une heure, jusqu'à l'intervention de la police. Selon un médecin légiste venu témoigner mercredi, cela lui a "probablement sauvé la vie".

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