Un Franco-Algérien considéré comme un cadre historique d'Al-Qaïda jugé aux assises à Paris

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Par Pierre ROCHICCIOLI - Paris (AFP)
Publié le 12 février 2018 - 20:41
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De nombreux barreaux étaient mobilisés jeudi pour dénoncer le silence du ministère de la Justice au
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© LOIC VENANCE / AFP/Archives
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Il était présenté par les services occidentaux comme un cadre historique d'Al-Qaïda: le Franco-Algérien Naamen Meziche, dit Abou Barae, comparaît depuis lundi devant la cour d'assises spéciale de Paris pour "association de malfaiteurs terroriste criminelle".

La justice reproche à cet homme de 47 ans de s'être rendu en Afghanistan pour combattre au côté d'Al-Qaïda. Il aurait fait allégeance à l'organisation jihadiste, suivi des entraînements militaires et combattu avant d'intégrer une unité destinée à commettre des attentats en Europe. Des faits passibles de vingt ans de réclusion criminelle.

Interrogé par la présidente Jacqueline Audax après l'exposé des faits, l'accusé a répondu: "Je les conteste".

Naamen Meziche, barbe et cheveux courts, explique s'être rendu en Afghanistan pour repérer un lieu pour faire la "hijra" avec sa famille (émigration vers une terre d'islam) et s'être retrouvé coincé, contraint de rejoindre Al-Qaïda pour avoir une chance de retourner en Allemagne, où il résidait. "Mais je n'ai pas réalisé que cela durerait des mois et des mois", a-t-il dit d'une voix douce, colorée d'un accent allemand.

Né à Paris, Naamen Meziche a grandi à Constantine (Algérie) avant de rejoindre Hambourg où il passe l'essentiel de sa vie, hormis un bref séjour en 1992 en France pour obtenir une carte d'identité française.

En Allemagne, il fréquentait la mosquée al-Qods où se retrouvaient des membres de la cellule dite de Hambourg, dont Mohamed Atta, impliqués dans les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis.

Peu avant les attentats, il a épousé la fille du prédicateur extrémiste de la mosquée, Mohamed al-Fizazi, qui sera par la suite écroué au Maroc pour son rôle dans les attentats de Casablanca qui firent 45 victimes en 2003. Le couple est aujourd'hui séparé.

- 'Obéir aux ordres' -

Selon un policier de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI, devenu DGSI) qui a témoigné lundi, ce mariage lui a sans doute servi de sésame pour intégrer rapidement Al-Qaïda, où d'ex-jihadistes jugés en Allemagne ont affirmé qu'il était "reconnu et respecté" par la hiérarchie du groupe.

"Impossible" cependant, selon lui, de savoir si "l'accusé était ou non un cadre de l'organisation": "Il avait vraisemblablement des responsabilités mais lesquelles, la procédure n'a pas permis de le démontrer".

Un proche de Ben Laden, Younis al-Mauritani, ancien chef des opérations extérieures d'Al-Qaïda chargé de planifier des attentats en Europe et arrêté au Pakistan en 2011, a rapporté aux enquêteurs avoir personnellement reçu l'allégeance de Meziche à Al-Qaïda. Autrement dit son "engagement à se soumettre et à obéir aux ordres, quels qu'ils soient, d'Oussama Ben Laden", a précisé la présidente. Il a cependant affirmé ne l'avoir chargé d'aucune mission particulière.

C'est en 1990 que Meziche effectue son premier voyage en Afghanistan pour rechercher son frère parti rejoindre Al-Qaïda. Mais c'est son second voyage dans les territoires tribaux en mars 2009 en compagnie d'un groupe de Hambourg qui lance la procédure judiciaire.

Sur place, Meziche aurait reçu un enseignement religieux, une formation au maniement des armes et explosifs notamment au camp Badr, fréquenté par les hauts responsables d'Al-Qaïda. Plus tard, il a complété sa formation avec un apprentissage des techniques de communication sécurisées.

Lorsque le camp est attaqué par l'armée pakistanaise, il aurait tenté de résister derrière une mitrailleuse Douchka prise à l'armée russe, selon des camarades de jihad.

Mais Meziche réfute ces témoignages, nie avoir prêté allégeance à Al-Qaïda et, s'il reconnaît avoir été armé, affirme ne pas avoir combattu.

C'est en 2011 que la justice allemande dénonce à la France les faits révélés dans une procédure allemande concernant Naamen Meziche. Une enquête est ouverte à Paris en raison de sa qualité de ressortissant français.

Meziche est arrêté au Pakistan en mai 2012 à un barrage militaire avec trois autres français candidats au jihad.

Le groupe est alors expulsé vers la France. Meziche est incarcéré en attendant son procès. Ses trois compagnons ont été jugés et condamnés en novembre 2014 à cinq ans de prison.

Plusieurs témoins étant absents, le procès initialement prévu jusqu'à vendredi pourrait se terminer jeudi.

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