Soupçons de corruption en Afrique : Vincent Bolloré face aux juges

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Par Benjamin LEGENDRE et Alexandre HIELARD - Nanterre (AFP)
Publié le 25 avril 2018 - 15:21
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L'homme d'affaires Vincent Bolloré était présenté mercredi à Paris aux juges susceptibles de le mettre en examen dans l'enquête sur des soupçons de corruption dans l'attribution à son groupe de concessions portuaires en Afrique de l'Ouest.

Le milliardaire de 66 ans, encore aux commandes du groupe Bolloré mais qui a récemment cédé les rênes de Vivendi à son fils Yannick, avait été placé en garde à vue mardi matin dans les locaux de la police anticorruption à Nanterre.

A ses côtés se trouvaient le directeur général du groupe Bolloré, Gilles Alix, et le responsable du pôle international de Havas, Jean-Philippe Dorent. Tous deux étaient eux aussi présentés mercredi aux juges du pôle financier de Paris, a-t-on appris de source judiciaire, confirmant une information de Challenges.

L'enquête vise des soupçons de "corruption d'agents étrangers dépositaires de l'autorité publique", "abus de biens sociaux" et "abus de confiance".

Le quatrième homme placé en garde à vue mardi, l'homme d'affaires français Francis Perez, patron de la société Pefaco très présente en Afrique, a pour sa part été remis en liberté peu après 14H00 sans charge retenue contre lui, a annoncé son avocat Me Jean Robert Phung.

Les juges d'instruction Serge Tournaire et Aude Buresi tentent de déterminer si le groupe Bolloré a utilisé les activités de conseil politique de sa filiale Havas pour se voir attribuer la gestion des ports de Lomé, au Togo, et de Conakry, en Guinée, via une autre de ses filiales, Bolloré Africa Logistics, anciennement appelée SDV.

SDV avait obtenu la gestion du port de Conakry quelques mois après l'élection d'Alpha Condé fin 2010, et avait remporté la concession à Lomé peu avant la réélection en 2010 de Faure Gnassingbé. Les deux candidats victorieux s'étaient attachés les services d'Havas et de M. Dorent.

Or, selon le journal Le Monde, les magistrats soupçonnent Havas d'avoir sous-facturé ses services, afin que le groupe Bolloré décroche ces deux contrats en contrepartie.

A chaque fois, la désignation de SDV a donné lieu à une bataille judiciaire entre le groupe Bolloré et les anciens gestionnaires. S'agissant de Conakry, l'ancien concessionnaire Necotrans avait ainsi déposé une plainte pour "corruption internationale" dès mars 2011. Mais elle avait été classée sans suite après quelques semaines par le parquet de Paris.

Les soupçons sur les activités africaines de Vincent Bolloré ont aussi été nourris par les plaintes d'un ancien associé franco-espagnol de M. Bolloré, Jacques Dupuydauby, évincé du port de Lomé en 2009.

C'est aussi en enquêtant sur le groupe Pefaco, société spécialisée dans l'hôtellerie et les jeux et très implantée en Afrique, que la justice avait resserré ses investigations sur les activités de Bolloré sur le continent. Son président, Francis Perez, 55 ans, est connu pour son réseau de relations en Afrique et pour sa grande proximité avec M. Dorent.

Selon l'avocat de M. Perez, les enquêteurs l'ont interrogé sur des versements, d'un montant total de 450.000 euros, effectués en 2010 au profit de ce dirigeant d'Havas.

"Ces quatre virements sont un prêt à un ami, qui a fait l'objet d'un acte notarié et qui est remboursé depuis six ans", a déclaré à l'AFP Me Phung, dénonçant des "fantasmes".

- "Sans autre forme de procès" -

Dans un communiqué mardi, le groupe Bolloré avait "formellement" démenti avoir commis des irrégularités en Afrique, où il gère 16 terminaux portuaires.

"Les concessions obtenues au Togo l'ont été en 2001, bien avant l'entrée du groupe dans Havas, et en Guinée, en 2011, à la suite de la défaillance du n°1 (le groupe étant arrivé en seconde position lors de cet appel d'offres), défaillance constatée avant l'élection du président", a fait valoir le groupe.

"Bolloré remplissait toutes les conditions d'appel d'offres. C'est un ami, je privilégie les amis. Et alors ?", s'était toutefois justifié Alpha Condé au journal Le Monde en 2016.

S'agissant de Conakry, Bolloré avait été condamné en 2013 à Nanterre à verser plus de 2 millions d'euros à Necotrans, l'ancien concessionnaire. Placé en redressement judiciaire en juin 2017, Necotrans avait alors été racheté par Bolloré.

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