Covid-19 : la mort dans l'âme, le Musée d'art moderne de Strasbourg remballe son expo phare

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Par Marie JULIEN - Strasbourg (AFP)
Publié le 10 février 2021 - 13:30
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Des opérateurs emballent les pièces d'une exposition consacrée à l'écrivain et critique d'art français Joris-Karl Huysmans au Musée d'Art Moderne et Contemporain de Strasbourg (MAMCS), le 9 février 20
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© PATRICK HERTZOG / AFP
Des opérateurs emballent les pièces d'une exposition consacrée à l'écrivain et critique d'art français Joris-Karl Huysmans au Musée d'Art Moderne et Contemporain de Strasbourg (MAM
© PATRICK HERTZOG / AFP

Au Musée d’art moderne et contemporain de Strasbourg (MAMCS), les caisses sont prêtes pour renvoyer à Paris des œuvres de Caillebotte, Degas ou Rodin, réunies pour une exposition phare tuée dans l'œuf par l'épidémie de Covid-19.

Déambulant entre les escabeaux, les visseuses et le matériel de protection, Estelle Pietrzyk, la commissaire de l'exposition "L'Oeil de Huysmans: Manet, Degas, Moreau...", ressent "une grande tristesse".

Cette exposition, riche voyage dans les univers qui ont forgé l'œuvre de l'écrivain et critique d'art français Joris-Karl Huysmans, a officiellement fermé ses portes dimanche. Mais en réalité, elles sont closes depuis la fin octobre, comme celles de tous les musées de France. Au lieu de quatre mois, l'exposition n'aura été accessible aux visiteurs que quatre semaines.

"On ne l'a pas assez faite vivre, c'est ça qui est triste", regrette Mme Pietrzyk, également directrice du MAMCS.

Les éléments de l'étrange fontaine d'encre de la Luxembourgeoise Su-Mei Tse, qui accueillait les visiteurs au son du clapotis de ses eaux noires, ont été démontés et sèchent lentement.

Au bas des vitrines, des affichettes indiquent dans quelles futures expositions elles seront réutilisées.

- "Casse-tête sans nom" -

Sur fond rouge, les célèbres toiles de Gustave Caillebotte, "Les Raboteurs de parquet", ou d'Edgar Degas, "Dans un café", dite aussi "L'Absinthe", sont encore accrochées comme si elles cherchaient à attirer le regard d'un visiteur qui ne viendra plus.

L'ombre du fusain et la lumière des pastels du "Temple vitrail" d'Odilon Redon disparaîtront sous peu dans la caisse sur mesure qui attend au pied du tableau pour repartir au Musée d'Orsay.

Deux "convoyeuses" du grand musée parisien viennent d'arriver à Strasbourg pour raccompagner les œuvres prêtées jusqu'à la capitale.

Avant ce grand départ, une restauratrice prend en photo une petite sculpture de Rodin pour le constat de voyage de l’œuvre.

L'opération de démontage va durer trois semaines.

Avec plus de 400 pièces exposées dans dix salles aux murs colorés, cette exposition, version étoffée de celle qui s'était tenue au Musée d'Orsay fin 2019, était initialement prévue pour débuter en avril.

Lors du premier confinement, l'éclairage a été réduit pour préserver les œuvres, les plus fragiles étant recouvertes et l'exposition repoussée au 2 octobre.

Et déjà un "casse-tête sans nom" s'est profilé pour réécrire les contrats de prêts des œuvres dont plusieurs sont promises à d'autres expositions "sur deux ou trois ans", explique Estelle Pietrzyk.

- Visite virtuelle -

"On a ouvert pour quatre semaines, et puis voilà", lâche la commissaire de l'exposition. Le deuxième confinement a sonné le glas.

Entre-temps, seules 13.000 personnes ont pu la visiter avec une jauge limitée à 80 visiteurs pour 600 m². Dans des conditions normales et sur les quatre mois prévus, le chiffre de 100.000 aurait pu être atteint.

Les réseaux sociaux auront été un pis-aller avec une visite virtuelle affichant plus de 4.000 vues sur YouTube et Facebook, de courtes vidéos thématiques, des podcasts et des conférences.

L'exposition dont les portes devaient se refermer le 17 janvier a été prolongée jusqu'au 7 février avec l'espoir d'une réouverture des musées, espoir déçu.

Prolonger de nouveau ? "Cela serait devenu très compliqué et périlleux. Et puis prolonger pour combien de temps au juste ? Qu'est-ce qu'on aurait indiqué sur les contrats de prêts?", s'interroge Mme Pietrzyk, qui s'est jointe à l'appel en faveur d'une réouverture des musées lancé récemment par Emma Lavigne, du Palais de Tokyo à Paris.

Le MAMCS se concentre désormais sur ses expositions à venir avec les propres collections du musée, comme celle prévue en mars sur le sculpteur alsacien François-Rupert Carabin.

"L'Oeil de Huysmans: Manet, Degas, Moreau..." a coûté 400.000 euros. "Cela fait cher la semaine", grince la directrice du musée.

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