Antiterrorisme : le contrôle des juges sur les assignations à résidence renforcé

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Par AFP - Paris
Publié le 16 février 2018 - 11:05
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© GERARD FOUET / AFP/Archives
Le Conseil constitutionnel a partiellement censuré vendredi l'article de la nouvelle loi antiterroriste sur les assignations à résidence
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Le Conseil constitutionnel a, pour la première fois, partiellement censuré vendredi une disposition de la nouvelle loi antiterroriste: il a renforcé le contrôle des juges administratifs sur les assignations à résidence, l'une des mesures emblématiques héritées de l'état d'urgence.

Les "Sages" étaient saisis d'une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) visant les "mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance". Prévues dans la loi d'octobre 2017 voulue par le gouvernement d'Emmanuel Macron, ces mesures ont remplacé les assignations à résidence en vigueur sous l'état d'urgence, régime d'exception instauré au soir des attentats jihadistes du 13 novembre 2015 à Paris et Saint-Denis.

Dans la nouvelle loi, l'article sur l'assignation à résidence autorise le ministre de l'Intérieur, pour prévenir des actes de terrorisme, à interdire à certaines personnes de se déplacer hors d'un périmètre géographique déterminé (et non hors du seul domicile comme sous l'état d'urgence). Cette interdiction peut être assortie de l'obligation de pointer périodiquement à un service de police ou de gendarmerie.

Le recours contre ce texte avait été déposé par les avocats de Farouk Ben Abbes, une figure de la mouvance islamiste radicale. Ce dernier a été assigné à résidence le 17 novembre 2015, une mesure régulièrement renouvelée pendant l'état d'urgence. Il a ensuite fait l'objet d'une mesure de contrôle administratif, dans le cadre de la nouvelle loi.

"C'est une demi-victoire, le principe de la mesure est maintenu mais l'arbitraire de l'administration est mieux encadré par le contrôle du juge", a réagi auprès de l'AFP Me Patrice Spinosi, avocat de la Ligue des droits de l'Homme (LDH) qui était intervenu à l'audience.

Durant l'état d'urgence, 754 assignations à résidence ont été prononcées. Dans le cadre de la nouvelle loi, 33 "mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance" sont actuellement en cours, selon le ministère de l'Intérieur.

- Autres recours -

Le domaine essentiel sur lequel le Conseil constitutionnel a exercé sa censure concerne les recours en justice des personnes visées par une assignation à résidence.

Il a d'abord considéré que le délai accordé par le législateur pour contester la mesure devant le tribunal administratif était trop court, et l'a porté d'un à deux mois.

Il a en revanche estimé trop long le délai d'un mois laissé au juge pour statuer sur ce recours, et demandé que la décision intervienne "dans de brefs délais".

Concernant la contestation par un assigné à résidence de la prolongation de cette mesure, les "Sages" ont jugé nécessaire qu'une formation collégiale du tribunal administratif se penche sur la question. La loi renvoyait la décision à un juge unique des référés, statuant seulement sur d'éventuelles "atteintes graves et manifestement illégales".

Ils ont reporté au 1er octobre la date de cette abrogation, pour laisser au législateur le temps de modifier les dispositions censurées.

Les avocats de Farouk Ben Abbes estimaient que l'article incriminé méconnaissait certains droits constitutionnels comme "la liberté d'aller et venir" et "le respect de la vie privée et familiale". Ils reprochaient également au législateur de ne pas avoir prévu de dispositions transitoires entre les deux régimes d'assignation à résidence (sous l'état d'urgence et dans la nouvelle loi).

Mais, d'une manière générale, le Conseil constitutionnel a considéré que le texte assurait un équilibre entre l'exigence d'ordre public et les libertés.

Il a toutefois jugé que, "compte tenu de la rigueur de la mesure", l'assignation à résidence ne pourra "excéder, de manière continue ou non, une durée totale cumulée" d'un an.

Si la loi limitait déjà la mesure à 12 mois, les "Sages" ont voulu s'assurer que le législateur ne pourrait étendre cette durée dans le futur et que l'administration n'utiliserait pas une interruption entre deux assignations pour prolonger également le délai maximum autorisé.

D'autres recours contre la nouvelle loi ont été déposés par la LDH et un Français résidant à Grenoble. Ces recours visent la nouvelle version des assignations mais également les "périmètres de protection", les "fermetures de lieux de cultes" et "les visites et saisies" (perquisitions administratives). Ils seront examinés plus tard par le Conseil constitutionnel.

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