Au Salon de l'agriculture, Jean-Marie Goujat veut défendre les éleveurs en crise

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Par Nicolas GUBERT - Paris (AFP)
Publié le 21 février 2020 - 10:26
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Jean-Marie Goujat (d) et son frère Laurent avec leur vache Idéale, le 27 janvier 2020 dans leur ferme de Cours-la-Ville, dans le Rhône
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© JEFF PACHOUD / AFP
Jean-Marie Goujat (d) et son frère Laurent avec leur vache Idéale, le 27 janvier 2020 dans leur ferme de Cours-la-Ville, dans le Rhône
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Vivre décemment de son métier: une idée fixe pour Jean-Marie Goujat. Passionné, l'éleveur d'Idéale, la vache charolaise égérie du Salon de l'Agriculture, témoigne de la fierté et des craintes d'une profession en grande détresse économique.

"Notre vision de l'élevage, ce n'est pas de chercher à faire du nombre, c'est vraiment de chercher à faire de la qualité, et aussi à vivre de notre métier", précise d'emblée à l'AFP M. Goujat, qui entend dès samedi et neuf jours durant tenir ce discours engagé auprès du monde politique en visite au salon.

Cet éleveur de 33 ans, marié et père de deux enfants, est aux petits soins avec les 125 vaches charolaises qu'il élève à Cours-la-Ville (Rhône), dans une zone de petite montagne à une cinquantaine de kilomètres de Charolles (Saône-et-Loire), le berceau de la race.

Avec son père et son frère, M. Goujat a pour but "de faire un élevage qui correspond aux valeurs qu'on défend, de respect de l'environnement, de l'animal, mais aussi de l'homme. Et pour que ça respecte l'homme, on se dit qu'il faut pouvoir vivre de son métier et pouvoir élever ses enfants sans vivre en marge de la société".

Or le porte-drapeau du Salon gagne "moins que le Smic", explique-t-il: "je ne considère pas que c'est correct, quand on travaille 70, 80 heures par semaine. Et honnêtement on n'est pas les plus mal lotis, on fait du label, on valorise nos animaux pour de la reproduction."

Afin de légitimer son souhait d'une digne rémunération, il égrène les efforts engagés pour répondre aux demandes sociétales: des mesures agro-environnementales, de conservation de la flore...

Il relève ainsi que toutes les prairies de l'exploitation "sont entretenues sans pesticides", ce qui protège "des plantes qui sont spécifiques à notre terroir, par exemple l'achillée millefeuilles, qui est parfois utilisée en restauration, ou la luzule champêtre".

Ses bêtes sont également choyées, à 1.000 lieues de l'agriculture intensive: "nos vaches, du mois d'avril au mois de novembre, elles vivent au pré, elles ont chacune un hectare de terrain. (...) L'hiver, elles vivent en bâtiment et elles mangent les fourrages qu'on a récoltés sur nos terrains", souligne l'éleveur, qui vend une partie de sa viande en label rouge.

- L'appétit de la Chine -

Jean-Marie Goujat s'inscrit dans une tendance prônée par l'interprofession des viandes Interbev.

"L'inquiétude aujourd'hui, pour tout le travail qui est fait (...), c'est qu'on manque de valorisation pour nos animaux", explique à l'AFP Guy Hermouët, président de la section bovins d'Interbev. "Notre plan de filière a été de monter en gamme, pour pouvoir justifier la prise en compte de nos coûts de production."

Concrètement, l'objectif est de faire passer le total des viandes en label rouge de 3% aujourd'hui à 40% dans les rayons de l'ensemble des magasins d'ici 2023, tout en imposant une contractualisation annuelle: la prise en compte des coûts de production valoriserait le kilo de viande label rouge un euro de plus, à 4,60 euros, indique M. Hermouët.

Seul hic, ce genre de contractualisation avec des distributeurs "reste de petites initiatives, dont on parle beaucoup mais qui pour les éleveurs représentent de petits volumes", nuance Jean-Marie Goujat.

D'après Interbev, le revenu moyen des éleveurs était en 2018 de 13.000 euros par an (brut avant charges sociales et avant impôts) et a encore baissé de 20% en 2019.

"Aujourd'hui, le revenu des éleveurs est catastrophique. Demain si on ne fait rien, l'élevage disparaîtra", prévient M Hermouët. Un marasme que, selon lui, l'aval de la filière commence toutefois à prendre en compte, à commencer par les transformateurs, notamment le tout puissant groupe Bigard.

"Il y a des marchés d'export qui s'ouvrent, vers la Chine notamment", avertit M. Goujat, pour qui la viande française de qualité, si elle n'était pas assez valorisée, pourrait à terme être exportée.

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