"Confinés mais pas résignés", des Français manifestent à leurs fenêtres

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Par Sarah BRETHES et Anne LEC'HVIEN - Paris (AFP)
Publié le 25 avril 2020 - 14:01
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Des habitants confinés en raison de l'épidémie de Covid-19 manifestent en exposant des banderoles à leurs fenêtres, le 23 avril 2020 à Paris
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© FRANCOIS GUILLOT / AFP/Archives
Des habitants confinés en raison de l'épidémie de Covid-19 manifestent en exposant des banderoles à leurs fenêtres, le 23 avril 2020 à Paris
© FRANCOIS GUILLOT / AFP/Archives

"Confinés mais pas résignés", ils ne se contentent pas d'applaudir à 20 heures. A coups de vieux draps et de peinture, des Français "manifestent" à leurs fenêtres, dessinant le portrait d'un pays où la colère monte.

"Merci aux soignants, honte aux dirigeants": cette banderole accrochée à Montreuil (Seine-Saint-Denis) résume bien la tonalité des milliers de messages spontanés affichés sur les façades à travers la France, que les syndicats ont appelé à multiplier pour le 1er mai.

Une contestation face à laquelle les autorités font parfois du zèle. Jeudi, à Toulouse, une femme a été brièvement placée en garde à vue pour avoir interrogé sur un drap tendu devant sa maison: "Macronavirus, à quand la fin?" A Paris et Marseille, d'autres auteurs de pancartes ont été sommés de les décrocher.

Délavée par des semaines d'exposition au soleil, la bannière de Florence Bedague au Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) est, elle, encore bien accrochée. "Des milliards pour la santé et les populations qui en ont besoin", y a écrit cette infirmière réaffectée en réanimation à l'hôpital parisien de la Pitié-Salpêtrière au début de l'épidémie.

"J'ai tout de suite compris qu'on allait avoir du mal à faire face. Et que c'est maintenant que la population allait voir que ce ne sont pas des millions, mais des milliards dont a besoin l'hôpital. Le bon côté c'est que les gens commencent à ouvrir les yeux et que les dirigeants commencent à faire l'unanimité contre eux", dit-elle.

La soignante, 58 ans, estime que la situation est devenue "catastrophique il y a 4-5 ans" et ne se remet pas de devoir se protéger du Covid-19 avec des sacs-poubelle, désormais fournis par sa direction.

A Paris, Thomas Ballion, 47 ans, enseignant, réclame à sa fenêtre de "L'argent pour l'hôpital, pas pour le capital". "On se manifeste" et "ça permet aux gens qui passent dans la rue de se sentir éventuellement raffermis dans leur propre colère", ajoute ce militant Lutte ouvrière.

A 20 heures, il applaudit mais donne aussi de la voix pour remercier "les aides-soignantes, les caissières, les éboueurs, les travailleurs" ou inviter à "ne pas aller bosser le 11 mai si les conditions ne sont pas assurées". Des slogans accueillis avec enthousiasme par certains, se réjouit-t-il.

- "On vous démasque" -

Sur les réseaux sociaux, le collectif "Confiné.e.s mais pas résigné.e.s", créé par des membres de la "Fanfare invisible", un groupe qui accompagne diverses manifestations, recense des images de ces banderoles.

"On en reçoit désormais plusieurs par jour, de partout en France et même de Tahiti", témoigne Johanna, de cette équipe réunissant "anars, cocos et socialos" en soutien au Collectif inter-hôpitaux, à l'origine du vaste mouvement de grève des soignants.

"Du fric pour l'hôpital public", "Du dépistage, pas du pistage", "On veut des masques, on vous démasque, on veut des tests, on vous déteste", "Après le Covid, la Commune": sur les messages postés aux fenêtres, "on voit de la colère face à la destruction de l'hôpital et des services publics et contre le gouvernement qui a fait et dit n'importe quoi", décrypte Johanna.

"Manifestons au balcon", qui relaie aussi cet appel sur les réseaux sociaux, est parti d'étudiants gravitant autour des jeunes socialistes, de LFI ou de l'Unef, "révoltés par les ordonnances sociales" prises au début du confinement, explique Valentin Mordago, 26 ans, cadre dans la fonction publique. Des jeunes militants qui rêvent d'"union de la gauche" et préparent "le monde d'après" avec "une économie du besoin et non du marché".

L'"après", Marie et Arthur y pensent aussi. Dans leur colocation du 20e arrondissement parisien, les cinq occupants, des trentenaires qui travaillent dans la santé, le social, l'agronomie et la culture, ont "débattu" avant d'afficher quatre banderoles: "Le travail mérite plus qu'une médaille" et "A la sortie, on change tout", notamment.

"Il faut rétablir des équilibres qui ne sont plus d'actualité depuis longtemps", estime Marie. "C'est la première fois qu'on a un événement qui touche autant de monde et au-delà de nos frontières. C'est inédit et il faut qu'on s'en saisisse".

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