La langue des signes à la peine dans le monde masqué

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Par Daniel MARTINEZ - Ramonville-Saint-Agne (France) (AFP)
Publié le 06 décembre 2020 - 15:33
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Vanessa Andrieu, enseignante en langues des signes s'occupe de ses élèves sourds, à l'école Sajus de Ramonville, près de Toulouse le 4 décembre 2020
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© Fred SCHEIBER / AFP
Vanessa Andrieu, enseignante en langues des signes s'occupe de ses élèves sourds, à l'école Sajus de Ramonville, près de Toulouse le 4 décembre 2020
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Maëly, 10 ans, élève dans une classe de CM2 pour enfants sourds, comprend "mieux" ses maîtresses depuis qu'elles portent des masques transparents, après des mois "difficiles" pour saisir le sens sans voir l'expression du visage.

L'arrivée de ces masques fournis par le rectorat après les vacances de la Toussaint a "soulagé" les enseignants en langues des signes de deux écoles de Ramonville, dans la banlieue de Toulouse. Cependant, ils regrettent que les enfants n'en soient pas encore dotés et doivent porter des masques classiques.

"Le visage est très important dans la langue des signes. Les informations sont beaucoup moins perceptibles s'il est caché, notamment les émotions, la colère, le plaisir... Avec un masque transparent, on a davantage accès aux expressions", explique Vanessa Andrieu, institutrice à l'école maternelle Gabriel Sajus de Ramonville.

Autour d'elle, ses petits élèves passent au tableau à tour de rôle pour exprimer avec leurs mains et leur visage leur connaissance des jours de la semaine ou de l'approche de Noël. Mais les mains et le visage de Vanessa Andrieu peuvent aussi servir à les gronder quand ils "dorment" ou regardent ailleurs.

Les élèves de cette enseignante sourde ne portent pas de masques, mais elle regrette que, dans cette école publique accueillant des classes pour enfants sourds, les enseignants "entendants n'aient pas eu aussi des masques transparents". "Il est très compliqué de communiquer avec eux", souligne-t-elle.

- "Buée sur le masque" -

D'autre part, note Fabienne Guelagueli, l'une des quatre personnes qui assistent Vanessa Andrieu dans sa classe de 24 élèves, même si le masque transparent permet de mieux saisir les expressions, "parfois, avec les petits, il faut le descendre pour qu'ils comprennent", d'autant que les modèles actuels "prennent la buée" et ne sont pas confortables.

Aussi bien à Gabriel Sajus qu'à l'école primaire Jean Jaurès, celle de Maëly, les enseignants espèrent que la qualité des masques transparents, fournis en nombre limité, s'améliorera.

Dans le domaine des masques et dans bien d'autres, "il reste encore beaucoup de travail", résume pour sa part la présidente de l'Association nationale de parents d'enfants sourds (ANPES), Catherine Vella.

Elle aussi rappelle que, dans la langue des signes, "les mains donnent certes l'information la plus importante, mais tout le haut du corps compte également pour bien comprendre".

De ce fait, Maëly, comme nombre de ses petits camarades, tend à enlever son masque quand elle s'exprime : "c'est difficile. On a du mal à se comprendre".

L'une des institutrices de cette fille de 10 ans, Marie-Paule Kellerhals, raconte, tout en le montrant avec ses mains, comment elle a adapté sa manière de s'adresser aux enfants quand elle a dû mettre un masque : "Je signe plus large, plus grand", avec des gestes plus amples, "un peu comme si un entendant parlait plus fort".

Ce matin-là, dans sa classe de CM2, après un exercice de calcul, les élèves se mettent par deux pour préparer un débat entre les "pour" et les "contre le téléphone portable pour les moins de 11 ans".

Loris, 11 ans, est "pour" car quand "on se sent seul", on peut "envoyer des messages à ses amis", explique-t-il à sa coéquipière, laquelle met en avant sa "peur" quand ses parents sont sortis : "Je peux les joindre si j'ai un problème", se rassure-t-elle, gardant cette fois-ci son masque sur la bouche.

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