Le pape en mode démineur a reçu la conférence épiscopale américaine

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Par Catherine MARCIANO - Cité du Vatican (AFP)
Publié le 13 septembre 2018 - 06:00
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Le pape François au Vatican, le 22 juin 2018
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© Alberto PIZZOLI / AFP/Archives
Le pape François au Vatican, le 22 juin 2018
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Le pape - en première ligne face à une déferlante de nouvelles enquêtes dévastatrices détaillant des abus sexuels commis par le clergé - a reçu jeudi très discrètement la direction de l'épiscopat américain, décidé à déminer le terrain le plus explosif de l'Eglise.

François s'est entretenu à huis clos dans son palais épiscopal avec le président de la conférence des évêques catholiques des Etats-Unis, le cardinal Daniel DiNardo, son vice-président Mgr José Horacio Gómez et son secrétaire général Mgr Brian Bransfield.

Ils étaient aussi accompagnés par l'archevêque de Boston, Sean O'Malley, président de la Commission pontificale pour la protection des mineurs et proche conseiller de François.

Ce dernier a été aperçu par l'AFP sortant de la cité du Vatican plus d'une heure après le début de la rencontre très attendue, mais la direction de l'épiscopat américain a évité les caméras avant de publier en fin de journée un communiqué succinct.

"Nous avons partagé avec le pape François notre situation aux Etats-Unis, comment le corps du Christ est lacéré par le mal des abus sexuels", a écrit le cardinal DiNardo.

"Il nous a écoutés avec une attention profonde venue du coeur. Cela a été un bon échange, long et fructueux", a-t-il ajouté, en formulant l'espoir de travailler avec François pour "identifier les prochains pas les plus efficaces".

Le Vatican s'est contenté jeudi de publier deux photographies du pape avec les évêques américains, l'une très souriante, l'autre au regard sévère.

Un sondage diffusé mercredi par la chaîne américaine CNN révèle une chute de popularité du pape François aux Etats-Unis. Seulement la moitié des Américains (48%) se déclarent favorable au pontife argentin, contre 72% en décembre 2013, première année de son pontificat.

Au sein des catholiques américains, sa cote a également baissé à 63%, contre 83% dix-huit mois plus tôt, souligne cette même enquête réalisée la semaine dernière auprès de 1.000 personnes.

Une enquête du procureur de Pennsylvanie (est des Etats-Unis) a mis au jour en août des abus sexuels perpétrés par plus de 300 "prêtres prédateurs" sur au moins un millier d'enfants. Cette révélation, qui s'ajoutait à la démission en juillet du cardinal Theodore McCarrick accusé d'abus sexuels anciens sur un adolescent de 16 ans, a secoué l'ensemble de l'Eglise américaine, révélant au passage de profondes divisions politiques entre les évêques.

Puis un ex-ambassadeur auprès du Saint-Siège, Mgr Carlo Vigano, a accusé fin août le pape d'avoir protégé Mgr McCarrick pendant cinq ans, arguant que cet ancien archevêque de Washington était présenté par des diplomates comme un redoutable prédateur homosexuel de séminaristes et prêtres.

Mgr Vigano accuse aussi François d'avoir balayé des sanctions (apparemment assez confidentielles) prononcées à l'encontre de Mgr McCarrick par son prédécesseur Benoît XVI.

- "Le 11 septembre de l'Eglise" -

Les abus sexuels commis par des membres du clergé sur des mineurs sont "le 11 septembre" de l'Eglise, a décrit mardi Mgr Georg Gänswein, secrétaire particulier du pape émérite Benoît XVI, en parlant de tant de victimes "blessées si gravement et mortellement".

Fin août le cardinal DiNardo avait exprimé son désir de rencontrer le pape.

Il avait fait valoir que les accusations de Mgr Vigano renforçaient la nécessité d'un examen "rapide et complet" des raisons pour lesquelles "les graves erreurs morales" de Mgr McCarrick ont été tolérées.

Mardi, un prêtre du diocèse de Mgr DiNardo à Houston a été arrêté, accusé d'abus sexuels par un homme de 36 ans lorsqu'il était lycéen, entre 1998 et 2001. Dans un communiqué, le diocèse évoque aussi le cas d'une jeune fille ayant accusé ce prêtre d'attouchements en 2001. Mais ses parents n'avaient finalement pas porté plainte et après une enquête interne, le prêtre avait pu reprendre ses fonctions en 2004.

Dans le même temps, le pape a accepté jeudi la démission d'un évêque américain, Mgr Michael Bransfield, qui a été accusé de "harcèlement sexuel sur des adultes", selon son diocèse. Il s'agit d'un cousin de Mgr Brian Bransfield, reçu le même jour au Vatican.

Le motif du "harcèlement" (non précisé par le Vatican) a été jusqu'ici très rarement utilisé par l'Eglise pour motiver des démissions, généralement liées à des abus sexuels ou tout simplement à l'âge avancé des prélats.

Si le pape François a refusé jusqu'à présent de commenter les accusations de Mgr Vigano, lancées voici presque trois semaines au beau milieu d'un voyage déjà compliqué en Irlande, le Saint-Siège a précisé lundi qu'il apporterait prochainement "les éclaircissements nécessaires".

François vient aussi de convoquer du 21 au 24 février 2019 au Vatican une réunion sans précédent de tous les présidents des conférences épiscopales dans le monde pour aborder le thème de "la protection des mineurs".

Sans obtenir de répit. La presse en Allemagne a dévoilé mercredi un rapport relatant des milliers d'abus sexuels sur mineurs passés sous silence durant des décennies.

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