Le Patriarche ukrainien Filaret se dit prêt à diriger une Église unifiée

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Par Oleksandr SAVOCHENKO - Kiev (AFP)
Publié le 26 octobre 2018 - 14:12
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Le patriarche Filaret (g) de l'Église orthodoxe ukrainienne, le 14 octobre 2018 à Kiev
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© Genya SAVILOV / AFP/Archives
Le patriarche Filaret (g) de l'Église orthodoxe ukrainienne, le 14 octobre 2018 à Kiev
© Genya SAVILOV / AFP/Archives

Le Patriarche Filaret, dont l'excommunication a été levée par Constantinople, a beau approcher les 90 ans, il se dit prêt à diriger la nouvelle Église orthodoxe ukrainienne indépendante de la tutelle religieuse de Moscou, au risque de provoquer des crispations.

Le Patriarcat de Constantinople a reconnu en octobre l'indépendance de la branche ukrainienne de l'Église orthodoxe, mettant fin à 332 années d'autorité spirituelle russe dans le pays, et couronnant plus de deux décennies d'efforts de Filaret.

Après l'indépendance de l'Ukraine en 1991 et la chute de l'URSS, cet ancien hiérarque du Patriarcat de Moscou a créé une Église orthodoxe séparée dont il s'est autoproclamé Patriarche, ce qui lui a valu d'être excommunié par sa hiérarchie russe.

Avec la décision de Constantinople, Filaret espère désormais prendre officiellement la tête d'une Église orthodoxe ukrainienne unifiée qui n'existe pour le moment que sur le papier.

"Je ne me suis pas battu pendant 25 ans, depuis le début de l'indépendance, pour me retirer du service de cette Église avant qu'elle n'acquière le statut qu'elle mérite", affirme-t-il à l'AFP dans sa résidence dans le centre de Kiev.

"Bien sûr" qu'il présentera sa candidature pour diriger cette nouvelle Eglise censée unifier les diverses paroisses orthodoxes de l'Ukraine, dont un grand nombre restent fidèles à Moscou.

Si ses gestes et ses paroles sont plus lents qu'autrefois, l'ecclésiastique de 89 ans n'a rien perdu de son charisme et paraît une dizaine d'années plus jeune.

"Tant que Dieu me donne la force, je servirai l'Église", lance-t-il, disant n'avoir même pas considéré la possibilité d'avancer une candidature plus jeune que la sienne.

À l'époque soviétique, Filaret était au service de l'Eglise orthodoxe russe. Mais en 1990, alors qu'il était considéré comme un candidat sérieux pour prendre sa tête, c'est un autre hiérarque qui a été désigné Patriarche, Alexis II.

Deux ans plus tard, Filaret créé un Patriarcat de Kiev dont il se proclame Patriarche. Celui-ci n'est alors reconnu par aucune autre Église dans le monde.

- "Sans violence" -

À la faveur de la rupture entre Moscou et Kiev, après l'arrivée au pouvoir de pro-occidentaux en Ukraine en 2014, suivie par l'annexion de la péninsule de Crimée par la Russie et d'un conflit meurtrier avec des séparatistes prorusses dans l'Est, son Église autoproclamée gagne en influence parmi les Ukrainiens.

Aujourd'hui, Filaret souhaite que les paroisses d'Ukraine se rallient à la nouvelle Église indépendante sur la base du volontariat et "sans violence".

"Environ deux diocèses sur trois de l'Église fidèle à Moscou vont passer vers l'Église ukrainienne" unifiée, assure-t-il en se basant sur des sondages.

L'une des questions les plus sensibles est de savoir à quelle Église seront rattachées les laures, ces grands monastères orthodoxes dont les plus symboliques sont celle de Kievo-Petchersk dans la capitale et celle de Potchaïv (ouest), actuellement rattachées au patriarcat de Moscou.

"Les laures sont des sites ukrainiens sacrés. Bien évidemment, ils doivent appartenir à l'Eglise ukrainienne", assène Filaret.

Comment la décision de Constantinople doit-elle s'appliquer concrètement? Ce n'est pas clair, mais l'ecclésiastique est persuadé que la nouvelle Église unifiée sera formée d'ici début 2019.

"Il n'y a pas d'autre choix. Moscou va tenter d'utiliser ses tactiques habituelles: l'intimidation et la réduction à l'état laïc" des prêtres qui quitteraient le Patriarcat de Moscou pour la nouvelle Église ukrainienne, affirme-t-il.

Le Kremlin a averti que la Russie entendait "défendre les intérêts des orthodoxes" en cas de troubles religieux en Ukraine. Le Patriarcat de Moscou a également annoncé la rupture de tous ses liens avec Constantinople, qualifié de "schismatique".

Le Patriarche russe Kirill "ne veut pas me parler. Il ne veut pas parler non plus au Patriarcat oecuménique" de Constantinople, affirme Filaret. "Il sera l'architecte de son propre isolement."

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