Les élèves d'une école nord-coréenne de Tokyo victimes du regain de tension avec Pyongyang

Auteur:
 
Par AFP
Publié le 04 novembre 2017 - 11:58
Image
Des portraits des dirigeants nord-coréens décédés, Kim Il-sung et Kim Jong-il, sont affichés dans le
Crédits
© Behrouz MEHRI, Behrouz MEHRI / AFP
Des portraits des dirigeants nord-coréens décédés, Kim Il-sung et Kim Jong-il, sont affichés dans les salles de classe du Lycée coréen de Tokyo.
© Behrouz MEHRI, Behrouz MEHRI / AFP

Au Lycée coréen de Tokyo, où dans les salles de classe dominent au-dessus du tableau les portraits des deux anciens dirigeants nord-coréens Kim Il-Sung et Kim Jong-Il, élèves et enseignants reçoivent des menaces de mort à chaque regain de tension avec la Corée du Nord.

Il s'agit d'une des quelque 60 écoles dites "pro-Pyongyang" du Japon desservant une communauté coréenne qui s'est développée au fil des décennies et a gardé des liens avec la Corée du Nord bien que n'ayant jamais vécu dans ce pays.

Il y a environ 500.000 Coréens au Japon, pour la plupart descendants de civils amenés pendant la brutale colonisation de la péninsule coréenne de 1910 à la reddition du Japon à la fin de la Seconde Guerre mondiale en 1945.

La division entre Nord et Sud et la guerre de Corée qui a suivi de 1950 à 1953 a également divisé cette communauté et des écoles telles que ce lycée de la capitale nippone sont apparues avec le soutien d'organisations favorables à la Corée du Nord ainsi que des financements de Pyongyang.

Elles continuent d'enseigner la langue et l’histoire de la Corée sous la direction de l'Association générale des résidents coréens du Japon, qui joue le rôle d'ambassade de fait de la Corée du Nord en l'absence de relations diplomatiques entre les deux pays.

- Menaces anonymes -

Les Coréens du Japon souffrent depuis longtemps de discriminations, dans le domaine de l'emploi notamment. Selon le proviseur du lycée Shin Gil-Ung, les tensions nées du programme nucléaire nord-coréen, qui devraient dominer la visite au Japon du président américain Donald Trump à partir de dimanche, ne font qu'aggraver les choses.

"Chaque fois qu'il y a de l'actualité (concernant la Corée du Nord), nous recevons des appels anonymes menaçant l'école d'un attentat à la bombe ou de tuer des élèves dans une station de métro proche d'ici", dit M. Shin à l'AFP. "Les filles ont dû cesser de porter notre uniforme dans les transports en commun", ajoute-t-il tristement.

Le Japon a été en première ligne ces derniers temps des provocations de Pyongyang, qui a tiré deux missiles au dessus de ses îles septentrionales.

L'anxiété et la tension provoquées par les menaces du régime de Pyongyang de "couler" le Japon dans la mer trouble bien des Coréens de l'archipel, en particulier les plus jeunes qui, bien que n'ayant pas la nationalité japonaise, n'ont pas connu d'autre chez soi.

Un des élèves, Hwang Song-Wi, 17 ans, dit regarder le journal télévisé avec des "sentiments mitigés".

Ri Chun-Hui, un avocat de Tokyo, souligne que la colère dirigée contre les Coréens du Japon du fait des provocations de Pyongyang, n'est pas nouvelle. Les enlèvements de Japonais ordinaires par des agents nord-coréens à la fin des années 1970 et au début des années 1980, dont Pyongyang a fait l'aveu en 2002, ont provoqué des réactions similaires.

- 'Un seul peuple' -

"Les Coréens étaient à une époque considérés comme les victimes de la colonisation japonaise mais nous sommes à présent traités comme si nous étions tous des auteurs de ces enlèvements", a déclaré M. Ri. "Le sentiment que l'on peut attaquer tout ce qui est lié à la Corée du Nord domine actuellement au Japon", a-t-il ajouté.

Ces personnes kidnappées, dont des adolescentes, étaient emmenées en Corée du Nord pour y former des espions à la langue et à la culture japonaises.

Pour les parents coréens souhaitant que leurs enfants apprennent la langue et la culture de leur pays d’origine, ces écoles pro-Pyongyang sont quasiment le seul choix, quelles que soient leurs opinions politiques.

"Puisqu'ils ne sont pas japonais, je veux que mes enfants aillent dans une école coréenne et apprennent la langue et l'esprit du pays. C'est ce qui compte le plus", dit la mère de Hwang Song-Wi, Oh Jong-E.

"Je pense dans le fond qu'il n'y a ni Nord ni Sud. Nous ne formons qu'un seul et même peuple", dit Mme Oh, elle-même ancienne élève de ce lycée.

Selon un responsable de l'Association générale des résidents coréens du Japon, Pyongyang a fait parvenir 48 milliards de yens (366 millions d'euros) aux écoles coréennes du Japon depuis 1957, bien qu'on ne sache pas combien le régime en mal de devises fournit actuellement.

Si certains enseignants se disent favorables au régime reclus, l'enseignement lui est devenu de plus en plus neutre au fil des ans.

Le fils de Mme Oh, gardien de but dans l'équipe de foot du lycée, rêve d'entrer dans la ligue professionnelle du Japon pour jouer un jour à l'international mais pas pour le Japon: pour la Corée du Nord. "J'espère qu'un jour je pourrai jouer pour ce pays", dit-il à l'AFP.

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
bayrou
François Bayrou, baladin un jour, renaissant toujours
PORTRAIT CRACHE - François Bayrou, député, maire de Pau et plusieurs fois ministres, est surtout figure d’une opposition opportuniste. Éternel candidat malheureux à la...
20 avril 2024 - 10:45
Politique
26/04 à 18:30
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.