Motion de censure et loi Travail : tensions à l'Assemblée et dans la rue

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La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 12 mai 2016 - 22:35
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Manuels Valls à l'Assemblée.
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©Charles Platiau/Reuters
Manuel Valls a fustigé les frondeurs socialistes prévenant qu'il ne laisserait pas "détruire la gauche de gouvernement".
©Charles Platiau/Reuters
Le rejet de la motion de censure déposée dans le cadre de la loi Travail n'a pas apaisé les tensions. La gauche semble plus que jamais divisée alors que la rue a une nouvelle fois montré son opposition au projet. Des manifestations une nouvelle fois émaillées de violences.

L'Assemblée a rejeté sans surprise jeudi une motion de censure de droite contre le gouvernement sur la loi travail, dans un climat tendu dans l'hémicycle et entre socialistes, de même que dans la rue.

Des manifestations ont eu lieu un peu partout en France, à l'appel des syndicats CGT, FO, FSU, Solidaires, Unef, UNL et Fidl. Cette cinquième journée de mobilisation contre le projet de loi porté par la ministre du Travail Myriam El Khomri a été moins suivie et parfois émaillée de violences.

Deux jours après le recours à l'arme constitutionnelle du 49-3 pour forcer l'adoption du texte controversé, seuls 246 députés ont voté la motion LR-UDI, alors qu'il en aurait fallu 288 pour provoquer la chute du gouvernement.

Outre la droite, le centre et les deux élus FN, la motion a été soutenue, pour des raisons opposées, par 15 députés de gauche, principalement du Front de gauche, qui ont plaidé ne pas avoir d'autre choix pour contrer une loi de "régression sociale" après une motion des gauches avortée (à deux signatures). Aucun socialiste n'a apporté ses suffrages à cette initiative de l'opposition.

Le projet de loi est maintenant considéré comme adopté en première lecture et poursuivra son parcours au Sénat à partir du 13 juin.

A un an de la présidentielle, les orateurs de droite, critiques d'un texte devenu au fil des "renoncements" pas assez libéral à leurs yeux, ont surtout fait un réquisitoire du quinquennat de François Hollande, qui aura "ruiné la France, trahi les siens".

Christian Jacob (LR) a appelé à "mettre fin, et vite" à "l'aventure" d'un pouvoir "en perdition". "La France se rappellera du quinquennat de François Hollande comme d’un interminable congrès du Parti socialiste", selon Philippe Vigier (UDI).

Dans cette ambiance de campagne, Bruno Le Roux, chef de file PS, a dénoncé en retour "la radicalité" des propositions LR sur le Code du travail, dont celles d'Alain Juppé, sous les protestations d'élus de droite, qu'il a qualifiés de "gueulards".

Déterminé à "mettre plus encore notre pays en mouvement" mais critique des solutions de droite, Manuel Valls a fustigé les "frondeurs" socialistes associés à la tentative de motion des gauches, prévenant qu'il ne laisserait pas "détruire la gauche de gouvernement".

Aussitôt après le résultat du scrutin, le numéro un du PS, Jean-Christophe Cambadélis a annoncé la saisine de la Haute autorité éthique du parti concernant les 24 socialistes signataires du projet de censure du gouvernement, dont d'anciens ministres comme Benoît Hamon et Aurélie Filippetti.

"Le gouvernement n'a pas de leçons de gauche à recevoir de vous", a aussi lancé le Premier ministre au chef de file Front de gauche André Chassaigne, qui a dénoncé "un quinquennat de renoncement aux principes et valeurs de la gauche".

Si les débats ont été interrompus quasiment dès le début de l'examen du texte par le 49.3, le gouvernement a retenu plusieurs amendements du rapporteur PS Christophe Sirugue, par exemple pour renoncer à restreindre le périmètre géographique des difficultés d'un groupe pour les licenciements économiques. Il a également renoncé à la surtaxation des CDD, un temps envisagée pour satisfaire les organisations de jeunesse, mais qui ulcérait le patronat.

Mais figure toujours l'un des points les plus contestés par une partie de la gauche et des syndicats : la primauté des accords d'entreprise sur les accords de branche. François Hollande a estimé jeudi qu'elle ne devait pas remettre en cause les "principes fondamentaux" du droit du travail.

Dans la rue, les opposants étaient à Paris entre 12.000 (selon la police) et 50.000 (selon la CGT). Le cortège s'est dirigé, sous haute protection des policiers et services d'ordre des syndicats, vers les Invalides, non loin de l'Assemblée, où quelques jeunes cagoulés ont lancé brièvement des projectiles sur les manifestants.

A Toulouse, de 3.000 (préfecture) à 12.000 personnes (syndicats) ont défilé, tandis qu'à Grenoble, entre un millier (police) et 4.000 personnes (CGT) ont manifesté, aux cris de "P comme pourris, S comme salauds, à bas le Parti socialiste".

Des heurts entre manifestants et forces de l'ordre se sont produits à Nantes, où la manifestation a rassemblé quelque 2.500 personnes, et, au Havre, le local PS a été saccagé. "L'opposition, cela ne peut jamais être la violence, les menaces, les saccages de permanences", a tonné le Premier ministre à l'Assemblée.

Deux autres journées de mobilisation sont prévues les 17 et 19 mai, ainsi que des grèves reconductibles dans certains secteurs (dockers, marins, SNCF...). Le numéro un de la CGT, Philippe Martinez, a appelé à "passer à la vitesse supérieure".

Le numéro un de FO, Jean-Claude Mailly, s'est voulu "optimiste", rappelant qu'il y a dix ans le contrat première embauche (CPE) avait été "adopté, voté, et retiré". Précédent également rappelé par le Front de Gauche au Palais-Bourbon.

 

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