Sentiment de trahison ou d'inquiétude, le Brexit divise à Hastings

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Par Robin MILLARD - Hastings (Royaume-Uni) (AFP)
Publié le 17 janvier 2019 - 21:09
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Le leader du Parti travailliste Jeremy Corbyn fait un clin d'oeil à un collègue lors d'un meeting politique à Hastings le 17 janvier 2019
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© Ben STANSALL / AFP
Le leader du Parti travailliste Jeremy Corbyn fait un clin d'oeil à un collègue lors d'un meeting politique à Hastings le 17 janvier 2019
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Ils se sentent trahis ou inquiets : à l'image de la classe politique britannique, les habitants de Hastings, sur la côte sud de l'Angleterre, sont profondément divisés sur le Brexit, les pêcheurs réclamant une rupture nette d'avec l'UE, d'autres défendant le maintien dans l'Union européenne.

Après le rejet massif mardi par les députés de son accord de divorce négocié avec Bruxelles, la Première ministre conservatrice, Theresa May, s'est tournée vers les partis d'opposition pour tenter de trouver un consensus et enfin résoudre le casse-tête du Brexit, à dix semaines de la date de sortie programmée du 29 mars.

Mais le chef du Parti travailliste, la principale formation de l'opposition, a refusé la main tendue : pas question, pour Jeremy Corbyn, de dialoguer tant que l'exécutif n'aura pas exclu l'éventualité d'une sortie sans accord, synonyme de rupture brutale de plus de quatre décennies de liens tissés entre Londres et l'UE.

Il l'a répété jeudi dans un discours prononcé à Hastings, une ville de 90.000 habitants située dans une circonscription remportée sur le fil par les conservateurs aux législatives anticipées de 2017.

Ce message passe toutefois très mal auprès des pêcheurs. "Nous voulons un +no deal+ et reprendre le contrôle de nos eaux territoriales", insiste Paul Joy, 69 ans, à la tête de la Hastings Fishermen's Protection Society, l'association des pêcheurs.

"Je me sens totalement trahi par les députés", ajoute-t-il.

Avec 27 bateaux, la flotte de pêche de Hastings est l'une des plus importantes en Europe à prendre la mer directement depuis une plage - il n'y a pas de port de pêche.

- "La fin de la démocratie" -

"Nous nous trouvons dans l'impasse seulement parce que les députés ne soutiennent pas la décision du pays", qui s'est prononcé à 52% en faveur du retrait de l'UE au cours du référendum du 23 juin 2016, analyse Paul Joy. A Hastings, le score a même atteint 55%.

"Le Brexit est géré par des personnes qui ne veulent pas quitter" l'UE, estime-t-il. "Nous sommes une communauté insulaire, une nation maritime et nous avons détruit presque toutes les communautés côtières de pêche en raison d'un manque d'accès aux poissons", dans le cadre de la politique commune de la pêche de l'UE.

Selon lui, l'organisation d'un deuxième référendum, comme le réclament nombre de députés, signerait "la fin de la démocratie".

La députée de la circonscription de Hastings et Rye est la ministre chargée du Travail, Amber Rudd, réélue de peu en 2017, avec une marge de 0,7%. Cette fidèle des fidèles de Theresa May, partisane du maintien dans l'UE, a récemment déclaré qu'elle voterait de la même façon si un autre référendum était organisé.

Cela en fait une cible de choix pour Jeremy Corbyn s'il parvient à son objectif de déclencher de nouvelles élections. Une première tentative a échoué, avec le rejet de justesse mercredi de sa motion de censure contre l'exécutif.

- "Pas le temps" -

Tous les habitants ne sont toutefois pas sur la même longueur d'onde. Célèbre pour la bataille de 1066 qui a marqué le début de la conquête normande, Hastings s'exaspère aussi de cet affrontement moderne au sujet des relations anglo-européennes.

"Cela ne va pas bien du tout. L'inquiétude s'accroît", constate l'artiste et designer Neil Hetherington, 46 ans, un partisan du maintien qui profite de l'éclatant soleil hivernal sur la promenade.

"Chaque jour, on semble faire un pas en arrière, et nous n'en avons désormais pas le temps", poursuit-il.

Pour Fritz Catlin, 56 ans, jardinier et ingénieur du son, "les responsables politiques se sont montrés incapables de travailler au service des gens. J'espère vraiment que nous ne partirons pas le 29 mars, mais tout semble possible désormais".

Plus que le Brexit lui-même, c'est la fracturation de la société qui inquiète Marianne Hall. "Je ne vois pas comment nous pouvons quitter l'Europe. Cela ne marcherait pas, nos sommes trop fortement intégrés. Je ne sais pas s'il y a une issue possible".

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