Pédophilie : l'Eglise dit sa "honte" et promet une longue lutte

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Par AFP
Publié le 22 mars 2017 - 16:42
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Mgr Olivier Ribadeau Dumas, le porte-parole de la Conférence des évêques de France (CEF), le 26 juil
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Mgr Olivier Ribadeau Dumas, le porte-parole de la Conférence des évêques de France (CEF), le 26 juillet 2016 à Cracovie
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Mise en cause par des enquêtes de Cash Investigation et Mediapart pour son attitude face à la pédophilie, l'Eglise catholique de France a réagi mercredi en disant sa "honte" mais aussi sa "détermination" à lutter contre ce "fléau".

"J'éprouve un sentiment profond à la fois de honte, d'humilité et de détermination parce que je suis bien conscient que nous avons commis des erreurs, qu'il y a eu des silences coupables, qu'on a plus voulu défendre l'institution que faire la légitime place aux souffrances des victimes", a souligné le porte-parole de la Conférence des évêques de France (CEF), Mgr Olivier Ribadeau Dumas, dans un entretien à l'AFP.

L'émission Cash Investigation diffusée mardi sur France 2 et des journalistes associés au site d'information Mediapart dans leurs articles et un livre publié mercredi ont dénoncé le "silence" de l'Eglise et accusé 25 évêques - cinq encore en poste, les autres à la retraite ou décédés - d'avoir "couvert" 32 "agresseurs" ayant fait 339 victimes. Des affaires qui remontent jusqu'aux années 60, mais la moitié des faits "ont été établis après 2000", selon ces médias.

Ces chiffres constituent "une agrégation de faits qui prend une dimension vertigineuse", reconnaît le porte-parole des évêques, tout en estimant que "Cash Investigation et Mediapart n'ont pas révélé de faits nouveaux".

La compilation de ces données écorne encore un peu plus l'image d'une institution qui se débat depuis des mois face aux accusations de déni ou de légèreté dans le traitement des affaires de pédophilie. Celle du père Bernard Preynat, soupçonné d'abus sexuels sur plus de 70 scouts lyonnais, a durablement atteint l'image du cardinal Philippe Barbarin, le puissant archevêque de Lyon.

"Il y a eu des erreurs d'appréciation et de gouvernement, comme l'a reconnu le cardinal Barbarin. Mais aucun évêque condamné pour avoir caché des faits n'est en poste aujourd'hui", assure Mgr Ribadeau Dumas.

L'un des quatre évêques français mis en cause au sujet d'un de ses prêtres - le cinquième, le supérieur de la Fraternité sacerdotale Saint Pie X (traditionalistes lefebvristes), Mgr Bernard Fellay, ne dépend pas de l'Eglise de France - a protesté de sa bonne foi. "Je n'ai pas couvert ce prêtre. Dès que j'ai eu connaissance de la part d'une famille que quelque chose s'était passé entre l'un de leurs fils et le prêtre, j'ai informé le procureur", a affirmé Mgr Jean-Luc Bouilleret, archevêque de Besançon.

- "Laver le linge sale en famille" -

"Pendant très longtemps, on n'a pas eu conscience de la gravité de certaines choses", relève-t-on à l'archevêché de Strasbourg, également mis en cause. Selon son chancelier le père Bernard Xibaut, cité par France Bleu Alsace, "on essayait de laver le linge sale en famille, et pour éviter que des agissements nuisibles aux enfants continuent, on déplaçait le prêtre".

La communauté Saint-Jean a déploré des "accusations infondées" vis-à-vis d'un de ses religieux ayant résidé au Cameroun, qui n'a jamais fait l'objet "d'aucun soupçon".

"On pourra déplorer parfois la lenteur des procédures (...) mais le prieur général, frère Thomas, n'a camouflé ni couvert aucun cas", affirme dans un communiqué cette congrégation déjà éclaboussée par des abus sexuels.

L'épiscopat rappelle son engagement sur ces questions depuis une quinzaine d'années et les mesures annoncées en avril 2016: création de dispositifs d'écoute des victimes et d'une commission d'expertise pour régler les cas de prêtres litigieux, prévention accrue auprès des séminaristes et novices...

"Il y a eu une culture du silence. Nous voulons la briser pour avoir une culture de l'écoute et de l'accompagnement des victimes: nous sommes entrés me semble-t-il dans cette nouvelle phase, ça met sans doute trop de temps. On ne fait pas bouger les mentalités comme ça", dit le père Ribadeau Dumas.

Faut-il passer à la vitesse supérieure avec une commission d'enquête indépendante comme le suggèrent certaines voix jusqu'au sein de l'Eglise?

L'épiscopat préfère laisser ses mesures "porter tout leur effet". Et prévient: "Nous en avons pour des années de lutte pour que ce fléau cesse".

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