Transformé en cantine d'entreprises, un restaurant d'Ardèche "limite la casse"

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Par Marjorie BOYET - Tournon-sur-Rhône (France) (AFP)
Publié le 05 février 2021 - 12:29
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Eric Besson, patron de la brasserie "Farconnet", dans les cuisines de son établissement, le 2 février 2021 à Tournon-sur-Rhône, en Ardèche
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© Philippe DESMAZES / AFP
Eric Besson, patron de la brasserie "Farconnet", dans les cuisines de son établissement, le 2 février 2021 à Tournon-sur-Rhône, en Ardèche
© Philippe DESMAZES / AFP

"Le sourire revient en voyant des clients rentrer dans le restaurant", exulte Eric Besson, 55 ans, à la tête d'une brasserie à Tournon-sur-Rhône (Ardèche), qui a adhéré à un dispositif lui permettant d'accueillir le midi des salariés du BTP.

Menu unique à 13 euros au "Farconnet" avec salade, gardianne de taureau, flan aux oeufs et café pour une quinzaine d'ouvriers, attablés par quatre maximum.

"Ca fait du bien, on est au chaud et on coupe, on parle d'autre chose" que du chantier situé tout près de là, se réjouit François Da Silva, chauffeur poids lourd dans une entreprise de réseaux.

Face à lui, son collègue Philippe Foriel, 53 ans, précise que depuis la fermeture des restaurants en raison de la crise sanitaire, ils mangeaient "chacun dans (leur) camion", des plats froids par -5°C à l'extérieur.

Tout à coup, une bougie pétillante surgit de la cuisine, sur une musique festive et des applaudissements nourris, pour fêter l'anniversaire d'un des ouvriers.

"On ne voyait plus ça ! Maintenant c'est boulot-maison, maison-boulot", peste M. Da Silva, en applaudissant.

C'est l'épouse d'Eric Vert, patron d'une entreprise de maçonnerie, qui a lancé les démarches auprès de la préfecture pour que des restaurants aient l'autorisation de recevoir les salariés travaillant à l'extérieur.

"On mangeait toujours au restaurant, on avait nos habitudes et manger dehors l'hiver, pfff", souffle M. Vert.

Six restaurants dans le département ont obtenu cette autorisation, à condition de signer une convention en bonne et due forme avec l'employeur des clients.

Et faute de convention, trois gendarmes de passage qui demandaient à pouvoir s'attabler seront poliment raccompagnés vers la sortie...

Après une période de flou, les établissements ont reçu l'assurance de la préfecture qu'ils continueraient à bénéficier des aides à la restauration, notamment du Fonds de solidarité et du chômage partiel.

"Si on m'enlève l'aide de 10.000 euros, ça ne sert à rien. Avec une quinzaine de couverts, le peu qu'on va gagner, c'est pour limiter la casse", estime M. Besson, qui a engagé d'importants travaux de remise aux normes début 2020.

- "Garder la main" -

Grâce au "bouche à oreille", le restaurateur a pactisé avec une "quinzaine" d'entreprises du bâtiment en deux semaines.

"Le but au fond, ce n'est pas pour l'argent, la priorité c'est de rendre service à ceux qui nous font travailler toute l'année", ajoute le chef de cuisine à l'accent chantant, en remplissant des barquettes pour les commandes à emporter.

Une autre restauratrice, Sindy Suiveng, elle, ouvre pour les "trois" à "cinq" ouvriers d'une entreprise habituée à fréquenter son auberge à Villevocance, située "à la campagne" et "un peu coupée du monde".

"On le fait pour garder la main et un lien social", ajoute la patronne de l'"Auberge des Platanes".

A Tournon, Valentin Besson, co-gérant du "Farconnet" et serveur à ses heures, craint que sur les chantiers, l'habitude de manger sur place reste une fois la crise passée, les ouvriers conservant leur prime de repas comme complément de revenu.

Le jeune homme plaide aussi pour une réouverture dès le printemps, en prévenant : "On ne peut pas louper la prochaine saison".

Habituellement, la famille Besson fait "une cinquantaine de couverts", voire le double en été. En haute saison, ils emploient jusqu'à "douze salariés".

L'adaptation en cantine d'entreprises a nécessité un changement provisoire de statut en "restaurant de collectivité" et donc de nouvelles normes vétérinaires à respecter.

"Je dois désormais faire un échantillon chaque jour que je congèle et j'ai dû prendre pour 500 euros par an un laboratoire vétérinaire qui fait des prélèvements et des analyses", explique M. Besson.

Au-delà du confort retrouvé pour les employés du BTP, il s'agit aussi "d'être solidaires" entre les entreprises, souligne Joël Mazoyer, tailleur de pierres, soulignant "le côté psychologique de remettre la lumière" pour les restaurateurs.

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