"La villa" : le c'était-mieux-avant de Robert Guédiguian (vidéo)

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Jean-Michel Comte
Publié le 22 novembre 2017 - 16:12
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Jean-Pierre Darroussin Ariane Ascaride Film La Villa
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©Agat Films & Cie/France-3 Cinéma/Diaphana Distribution
Jean-Pierre Darroussin, Ariane Ascaride,Gérard Meylan: deux frères et une soeur dans la calanque de Méjean près de Marseille.
©Agat Films & Cie/France-3 Cinéma/Diaphana Distribution
Deux frères et une sœur se retrouvent dans une calanque près de Marseille, dans la maison de leur père victime d'une attaque cérébrale. C'est l'occasion pour eux de revenir sur leur passé, dans "La villa", le film nostalgique de Robert Guédiguian qui sort ce mercredi.

"Je te le dis: c'était mieux avant", dit Jean-Pierre Darroussin. Cette réplique résume un peu le 20e film de Robert Guédiguian, La villa (ce mercredi 29 sur les écrans), dont il est l'alter ego et qui, comme lui, porte un regard désabusé sur le temps qui passe.

Le réalisateur de Marius et Jeannette a réuni à nouveau le trio de ses acteurs fétiches: outre Darroussin, sa compagne Ariane Ascaride et Gérard Meylan. Tous trois jouent deux frères et une sœur qui se retrouvent dans la calanque de Méjean, près de Marseille, dans la villa de leur père qui vient d'être victime d'un AVC et ne peut plus communiquer avec eux.

La vie et le temps qui passe les a séparés, surtout la sœur, comédienne de théâtre, qui n'était jamais revenue après la noyade de sa petite fille vingt auparavant. Entre les trois, il est question d'éventuellement vendre la villa, même si l'un des deux frères (Gérard Meylan) continue de tenir le petit restaurant populaire et modeste qui y est lié.

Il est aussi question des idéaux de jeunesse, politiques et sociaux, que leur a légués leur père, qui a construit cette villa de ses propres mains et a toujours lutté pour l'égalité, la liberté et la défense de la classe ouvrière. Et tous constatent que les temps ont bien changé, comme le fait le vieux couple voisin de la villa, qui refuse que leur fils médecin les aide financièrement pour couvrir le triplement du loyer de leur petite maison.

Le monde nouveau, l'autre frère (Jean-Pierre Darroussin) a du mal à s'y faire, même s'il est en couple avec une de ses anciennes étudiantes qui a la moitié de son âge (Anaïs Demoustier) et à qui il reproche d'avoir "la tête à droite et le cœur à gauche, comme tout le monde". "De l'ancien monde, il ne reste personne", confirme son frère. "Qu'est-ce qui a changé comme ça?", demande la sœur.

Le monde nouveau, c'est aussi la mondialisation, le terrorisme, les migrants. Pendant ces quelques jours de nostalgie, débarquent dans la calanque des militaires de l'opération Sentinelle à la recherche d'immigrés clandestins arrivés par la mer et qui vont s'immiscer dans cette histoire…

L’idée initiale de Robert Guédiguian était de tourner le film entièrement dans la calanque de Méjean, "qui m’a toujours fait penser à un théâtre", dit-il. "Les petites maisons colorées, encastrées dans les collines, semblent n’être que des façades... Elles sont surplombées par un viaduc où les trains ont l’air de jouets d’enfant".

Le père, les trois enfants, les vieux voisins, les habitants du coin et ceux de passage: c'est le cadre pour une réflexion sur le passé, sur l'époque actuelle, sur les liens familiaux et l'héritage moral, sur la maladie, la retraite, la vieillesse, la mort… "Tous ces hommes et toutes ces femmes ont un sentiment commun. Ils sont à un moment de leur vie où ils ont une conscience aiguë du temps qui passe, du monde qui change", explique le réalisateur. "Les chemins qu’ils avaient ouverts se referment peu à peu. Il faut sans cesse les entretenir... ou bien en ouvrir de nouveaux. Ils savent que leur monde disparaîtra avec eux. Ils savent aussi que le monde continuera sans eux..."

Il y a quelques moments d'espoir, un peu d'humour, et c'est l'occasion pour Robert Guédiguian, conscience politique de gauche, membre du Parti communiste dans les années 60-70, sympathisant du Front de gauche, électeur de Jean-Luc Mélenchon, de défendre ses valeurs sociales et de redonner (un peu) foi en l'humanité, notamment grâce à une dernière scène magnifique.

Mais le film a une atmosphère d'ensemble très nostalgique, sombre, pessimiste, voire déprimante. "Question d’âge, peut-être…", répondait récemment Robert Guédigiuan, 63 ans, dans une interview au Monde. "Quand j’avais 20 ans, je pensais qu’un jour les choses iraient mieux pour tout le monde. Aujourd’hui, je crois plutôt qu’il faut toujours se battre pour que le monde ne devienne pas pire que ce qu’il est. En écrivant ce scénario, j’ai eu le sentiment d’être sous les auspices de Tchekhov plutôt que de Pasolini. De faire un film à la fois triste et beau, empreint d’une forme de résignation, d’un sentiment d’impuissance".

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