La France prend les manettes du Conseil de l'Europe dans une période critique

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Par Marie JULIEN - Strasbourg (AFP)
Publié le 08 mai 2019 - 08:45
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Le Conseil de l'Europe, le 5 mai 2019 à Strasbourg
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© FREDERICK FLORIN / AFP/Archives
Le Conseil de l'Europe, le 5 mai 2019 à Strasbourg
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La France préside à compter du 17 mai le Conseil de l'Europe, avec la tâche épineuse de sortir l'organisation paneuropéenne de défense des droits humains de sa crise avec la Russie, qui entre dans une période critique.

Cela n'était pas arrivé depuis 22 ans. Avec une présidence tournante semestrielle des 47 Etats du Conseil de l'Europe se succédant par ordre alphabétique, l'occasion se fait plutôt rare. Et, hasard du calendrier, cette présidence s'annonce cruciale.

"Elle intervient à un moment délicat pour l'organisation", reconnaît l'ambassadeur Jean-Baptiste Mattéi, représentant permanent de la France auprès du Conseil de l'Europe.

Créé pour redonner vie aux droits de l'homme sur un continent ravagé par la guerre, le Conseil de l'Europe fête ses 70 ans, l'occasion de rappeler ses succès -au premier rang desquels la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH)- mais aussi les difficultés budgétaires et de fonctionnement qu'il traverse.

Le 25 juin, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE) élira son nouveau secrétaire général qui succèdera au Norvégien Thorbjorn Jagland. Deux candidats plutôt consensuels sont en lice: le vice-Premier ministre belge Didier Reynders et la ministre croate des Affaires étrangères et européennes Marija Pejcinovic Buric.

Mais cette élection pourrait marquer un point de non-retour dans la crise entre l'organisation et la Russie.

Pour sanctionner l'annexion de la Crimée par Moscou, l'APCE avait privé de leurs droits de vote en 2014 les parlementaires russes siégeant en son sein. Moscou a répliqué par la politique de la chaise vide. Et depuis 2017, la Russie ne verse plus sa contribution de 33 millions d'euros au budget annuel du Conseil de l'Europe, faisant planer une menace de réduction d'effectifs et d'activités sur l'institution.

Les parlementaires russes étant absents des bancs de l'APCE, ils ne votent plus depuis cinq ans pour élire les juges de la CEDH, ni le commissaire aux droits de l'homme. L'élection du prochain secrétaire général du Conseil pourrait être la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Si les Russes ne peuvent toujours pas voter, Moscou menace de quitter purement et simplement le Conseil de l'Europe.

- "Changement dramatique" -

Dans cette hypothèse, les quelque 144 millions de citoyens russes seraient privés de tout recours devant la CEDH. "Cela serait un changement dramatique pour eux s'ils n'étaient plus en aucune façon reliés à l'ordre juridique européen", a considéré Thorbjorn Jagland, dans un entretien à l'AFP.

"Le Conseil de l'Europe a besoin de la Russie comme la Russie et les Russes ont besoin du Conseil de l'Europe, ce qui suppose que ses droits d'Etat membre soient respectés mais aussi que la Russie remplisse ses obligations à l'égard de l'institution", a prévenu lundi le président français Emmanuel Macron.

Le temps presse pour trouver une solution qui satisfasse Moscou sans heurter des pays comme l'Ukraine ou les Etats baltes, qui parlent d'un "chantage" russe, et sans donner l'impression de valider l'annexion de la Crimée, jugée "illégale" par le Conseil de l'Europe.

La Finlande espère passer le flambeau de la présidence à la France en mettant d'accord tout le monde sur une nouvelle procédure interne le 17 mai lors d'une réunion du comité des ministres du Conseil de l'Europe à Helsinki.

"Cela va dans la bonne direction, mais nous ne pouvons pas garantir que cela aboutisse à une solution d'ici juin", a prévenu Jean-Baptiste Mattéi.

En dehors de la question russe, la France a fixé trois "priorités"à sa présidence. La première se rapporte au "coeur du métier" du Conseil de l'Europe, le renforcement du système européen de protection des droits de l'homme.

Paris mettra aussi l'accent sur la lutte contre les violences faites aux femmes et contre le racisme et l'intolérance.

Et la France veut amener le Conseil de l'Europe "à s'adapter à son époque" en relevant les défis posés aux droits de l'homme et à l'Etat de droit par l'essor du numérique et de l'intelligence artificielle.

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