Belgique : 20 ans de prison contre un diplomate iranien pour un projet d'attentat en France

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Par Matthieu DEMEESTERE - Anvers (Belgique) (AFP)
Publié le 04 février 2021 - 05:00
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Des personnes manifestent le 4 février 2021 devant le tribunal d'Anvers, en Belgique, en agitant d'anciens drapeaux iraniens
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© DIRK WAEM / BELGA/AFP
Des personnes manifestent le 4 février 2021 devant le tribunal d'Anvers, en Belgique, en agitant d'anciens drapeaux iraniens
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Un diplomate iranien a été condamné jeudi en Belgique à la peine maximum de 20 ans de prison pour avoir projeté un attentat contre un rassemblement d'opposants au régime de Téhéran en France, une tentative déjouée in extremis par la justice antiterroriste belge il y a près de trois ans.

Le jugement a été applaudi par les militants du Conseil national de la résistance iranienne (CNRI) qui avaient rallié le tribunal d'Anvers (Nord) où a été jugée l'affaire. C'est leur grand rassemblement annuel de Villepinte, près de Paris, qui était la cible de ce projet avorté, à l'été 2018.

Le diplomate Assadollah Assadi, 49 ans, jugé avec trois complices pour "tentatives d'assassinat à caractère terroriste" et "participation aux activités d'un groupe terroriste", a écopé de la peine maximale conformément à ce qu'avait demandé l'accusation lors du procès fin novembre.

Considéré comme le coordinateur de l'opération, il nie les faits et était absent à l'énoncé du jugement.

L'Iran a dénoncé le verdict, fustigeant une procédure judiciaire "illégale et en violation flagrante du droit international", en raison de l'immunité diplomatique de M. Assadi.

Ce dernier fera "vraisemblablement" appel de la décision, a dit à l'AFP son avocat Me Dimitri de Béco.

L'Union européenne va "analyser les implications du jugement", a déclaré un de ses porte-parole, précisant que le diplomate, à l'époque en poste à l'ambassade d'Iran à Vienne, figurait "sur la liste européenne antiterroriste".

- "Terrorisme d'Etat" -

Ce dossier, mêlant espionnage et terrorisme, a suscité des tensions diplomatiques entre Téhéran et plusieurs capitales européennes, dont Paris.

Les opposants ciblés ont dénoncé de leur côté un projet relevant du "terrorisme d'Etat", qui aurait pu provoquer "un bain de sang" alors que des milliers de personnes assistaient à ce meeting de Villepinte.

Un attentat à la bombe devait viser le 30 juin 2018, dans ce complexe d'expositions, la grand messe annuelle du CNRI, coalition d'opposants dont la principale composante est l'organisation des Moudjahidine du peuple (MEK).

Le jour même, un couple belgo-iranien domicilié à Anvers est arrêté par la police belge dans les environs de Bruxelles en possession de 500 grammes d'explosif TATP et d'un détonateur dans sa voiture.

L'interpellation a lieu in extremis et le rassemblement se tient comme prévu avec ses invités de prestige, dont une vingtaine sont parties civiles dans la procédure aux côtés du CNRI (entre autres la Franco-Colombienne et ex-otage des FARC Ingrid Betancourt).

- De 15 à 18 ans pour les complices -

En chemin pour regagner l'Autriche, M. Assadi est arrêté le 1er juillet en Allemagne, où les enquêteurs estiment qu'il ne bénéficie plus de son immunité diplomatique.

Ces derniers sont en possession d'images le montrant le 28 juin à Luxembourg, en train de remettre un paquet contenant la bombe au couple belgo-iranien.

Selon l'accusation, l'enquête a montré qu'Assadi est en réalité un agent du renseignement iranien "agissant sous couverture diplomatique", et qu'il a coordonné ce projet terroriste en s'appuyant sur trois complices, le couple domicilié à Anvers ainsi qu'un ancien poète dissident iranien exilé en Europe.

La femme du couple, Nasimeh Naami, 36 ans, a été condamnée à 18 ans de prison - le tribunal épinglant sa personnalité particulièrement "manipulatrice" - et son compagnon Amir Saadouni (40 ans) à 15 ans.

L'ex-dissident Mehrdad Arefani (57 ans), présenté comme un agent du renseignement iranien agissant depuis la Belgique, écope d'une peine de 17 ans. Seul prévenu présent, il est resté impassible au prononcé de sa condamnation.

Les avocats des parties civiles se sont félicités d'avoir obtenu gain de cause sur "tous les points".

Le tribunal a reconnu "la responsabilité des services secrets iraniens" qui "ont donné la bombe et les ressources financières" permettant de fomenter ce projet, a expliqué l'un d'eux Me Georges-Henri Beauthier.

Cet avocat a dit craindre des "pressions iraniennes importantes" en vue d'un éventuel "marchandage" de prisonniers, alors que la situation d'un universitaire condamné à mort en Iran pour espionnage a suscité l'émotion en Belgique.

Il s'agit du Dr Ahmadreza Djalali, un spécialiste de la médecine d'urgence qui a été professeur invité à l'Université flamande de Bruxelles (VUB). Il a été arrêté lors d'une brève visite en Iran en 2016.

"On s'inquiète bien évidemment de son sort et on continue à demander aux autorités iraniennes de ne pas appliquer la peine de mort", a affirmé jeudi à l'AFP le ministre belge de la Justice Vincent Van Quickenborne.

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