Fumigènes et pastis pour dératiser les rues de Paris

Auteur:
 
Par Maryam EL HAMOUCHI - Paris (AFP)
Publié le 28 septembre 2018 - 11:57
Image
Un bénévole montre un rat mort, probablement tué par un chien, le 20 septembre 2018 à Paris
Crédits
© Christophe ARCHAMBAULT / AFP
Un bénévole montre un rat mort, probablement tué par un chien, le 20 septembre 2018 à Paris
© Christophe ARCHAMBAULT / AFP

"Venez dans mon immeuble monsieur, là-bas il y a plein de rats". Avec des fumigènes, des tapettes et même du pastis, Jacques d'Allemagne dératise bénévolement les rues de Paris.

Côté cour, Jacques, 54 ans, est conseiller financier et juriste. Côté jardin, il traque les rongeurs depuis son enfance et a été président de l'Association des piégeurs agréés d'Île-de-France pendant cinq ans.

Cet été, le maire LR du XVIIe Geoffroy Boulard, qui fustige un "manque d'expertise" de la mairie de Paris, a préféré avoir recours aux services bénévoles de Jacques pour dératiser les abords d'une crèche infestée.

"J'ai principalement utilisé des nasses pour piéger les rats. J'en ai capturé une vingtaine", raconte Jacques, qui a suivi une formation de trois jours à l'issue de laquelle il a reçu de la préfecture un "agrément de piégeur".

Au pied d'un arbre, il repère un terrier où il dépose un petit sachet contenant un fumigène, habituellement destiné à chasser les taupes. Lorsqu'il le recouvre d'eau puis de terre, du gaz s'en dégage et asphyxie les rats.

De manière plus originale, le pastis fait partie de sa panoplie de traqueur de rats. "Il faut motiver les rats pour qu'ils aillent dans la boîte installée par la mairie où se trouvent les produits toxiques, explique le bénévole. Comme les rats aiment l'anis, je mets une goutte de pastis devant la boîte."

Pour Geoffroy Boulard, les méthodes de Jacques sont les bienvenues. "Nous sommes face à une urgence sanitaire, estime-t-il. Les rats ça fait bien deux ans que ça devient un problème fort."

Les experts évaluent le nombre de rongeurs à Paris à près de quatre millions. Leur recrudescence dans les rues s'explique, selon la mairie, par l'augmentation des déchets alimentaires et les crues de la Seine qui ont poussé les rats à sortir des égoûts.

En janvier, au moment de la crue, une vidéo virale montrant une colonie de rats grouillant dans une poubelle s'était répandue sur les réseaux sociaux.

-"Nourrisseurs de rats"-

Poubelles hermétiques, verbalisation des "nourrisseurs de rats" intentionnels par une amende de 68 euros, installation de boîtes contenant des raticides... : la Ville a mis en place en 2016 un plan de lutte contre les rats doté d'un budget de 1,5 million d'euros. Quelque 69 agents y sont dédiés.

Elle affirme également avoir considérablement augmenté le nombre d'interventions (près de 5.000 de janvier à juillet 2018 contre 1.700 pour la même période un an plus tôt).

Certains Parisiens continuent pourtant de juger la situation critique. "On est débordés. Les habitants ont peur", s'alarme Hervé Gaudière, gardien d'immeuble dans le XVIIe.

"C'est vraiment un fléau, c'est problématique pour les enfants", abonde une mère accompagnée de son fils qui s'engouffre dans son école où un rat mort a été retrouvé dans la cour.

"Ce sont les +nourrisseurs de rats+ qui nous posent le plus problème. Sinon ce que fait la mairie aurait fonctionné", estime Jacques, qui considère son action comme complémentaire de celle de la Ville.

Geoffroy Boulard estime, lui, que la mairie de Paris n'en fait pas suffisamment, et réclame le doublement du budget dédié à la dératisation.

De retour d'un voyage à New York, où il est allé piocher des idées chez les édiles de Brooklyn et de Manhattan, il espère également que la Ville de Paris généralisera l'utilisation de la glace carbonique, réputée efficace aux Etats-Unis.

Une fois déposés dans des terriers, les glaçons de gaz carbonique se réchauffent et dégagent du CO2 qui asphyxie les rats.

"La glace carbonique est déjà en cours d'expérimentation, mais il faut attendre l'avis de l'Anses (Agence de sécurité sanitaire, ndlr) et voir si ça fonctionne avant d'envisager une quelconque généralisation", indique-t-on à la mairie.

Geoffroy Boulard a lancé en juin le site signalerunrat.paris qui a reçu plus de 3.000 signalements dans le XVIIe et qui intéresserait, selon lui, d'autres maires d'arrondissement. De son côté, l'Hôtel de Ville renvoie à son site "Dans ma rue" qui permet déjà de déclarer, entre présence de détritus et incivilités, la présence de rats.

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
bayrou
François Bayrou, baladin un jour, renaissant toujours
PORTRAIT CRACHE - François Bayrou, député, maire de Pau et plusieurs fois ministres, est surtout figure d’une opposition opportuniste. Éternel candidat malheureux à la...
20 avril 2024 - 10:45
Politique
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.