La radicalisation dans les services publics : marginale mais des "trous" à combler

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Par Emmanuel DUPARCQ - Paris (AFP)
Publié le 26 juin 2019 - 15:42
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Les services publics, notamment les secteurs cruciaux de la sécurité et de l'éducation, sont peu touchés par la radicalisation mais la menace persiste et des progrès restent à faire dans les prisons, la santé ou les transports, selon un rapport parlementaire publié mercredi.

Dans un pays marqué par les attentats et le départ de plus de 1.500 personnes en Irak et en Syrie, les députés rapporteurs du texte, Eric Poulliat (LREM, Gironde) et Eric Diard (LR, Bouches-du-Rhône), se veulent globalement rassurants tout en appelant à la vigilance.

"La radicalisation est loin d'être un problème majeur au sein des services publics, l'Etat a pris des mesures ces dernières années, donc certaines fonctionnent bien. Mais il suffit d'un cas, et il existe encore des trous dans la raquette", explique à l'AFP M. Poulliat.

Constat partagé par le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner, qui a assuré que le phénomène est "extrêmement circonscrit" mais qu'il faut "rester vigilant" notamment dans le milieu du "sport", de "l'accompagnement scolaire" et des "prisons", a-t-il précisé à l'Assemblée nationale.

Selon M. Poulliat, la radicalisation suppose de considérer que "l'action violente contre l'Etat" est "légitime" mais "ne doit pas être confondue avec une pratique rigoriste de la religion, le fondamentalisme ou les atteintes à la laïcité".

Le rapport, fruit d'entretiens menés depuis l'automne avec des responsables de services publics, conclut que l'armée, la police, la gendarmerie et l'Education nationale "ne sont touchées par la radicalisation que de façon marginale". Les cas soupçonnés - et pas nécessairement avérés - concernent 0,05% des effectifs dans l'armée de terre, 0,03% dans la marine et une trentaine de situations dans la police et la gendarmerie (sur un total de 130.000 gendarmes et 150.000 policiers).

Le rapport s'inquiète toutefois de "zones d'ombre" persistantes dans la santé, l'université, les transports, la détention carcérale et le sport, faute de prévention, de détection ou d'une "prise de conscience" suffisantes.

Il souligne particulièrement le niveau de radicalisation chez les détenus, inquiétant dans un contexte de "surpopulation carcérale".

- Contacts avec la jeunesse -

Côté transports, à l'aéroport Roissy-Charles de Gaulle, sur 80.000 personnes titulaires d'un badge d'accès aux zones "réservés", 80 personnes font l'objet d'un suivi régulier pour radicalisation et 29 d'un suivi ponctuel, note le rapport.

La RATP a indiqué aux auteurs du rapport avoir reçu plus d'une centaine d'avis négatifs sur des candidatures d'agents de la part du Service national des enquêtes administratives de sécurité (SNEAS), créé en 2017 et chargé de détecter les profils suspects au sein de l'administration. L'un des kamikazes des attentats de novembre 2015 au Bataclan, Samy Amimour, avait été chauffeur de bus RATP.

Plus globalement, les deux députés ont "constaté une montée du communautarisme dans certains métiers liés aux transports". "Même si ça ne veut pas dire radicalisation, c'est parfois une étape vers la radicalisation", a souligné Eric Poulliat.

Dans le sport, ils ont remarqué "une montée des clubs communautaires, dans le football par exemple" et "une infiltration radicale dans les sports de combat".

Leur rapport plaide pour un renforcement des formations de détection de la radicalisation et une meilleure communication entre administrations.

Ils insistent sur la nécessité d'élargir les moyens et le champ de compétences du SNEAS, afin notamment de pouvoir mieux contrôler "les agents de service public en contact avec la jeunesse", souligne Eric Diard.

Avec des moyens encore limités (23 agents et 5 réservistes), le SNEAS a réalisé 318.464 enquêtes en 2018, dont 485 ont donné lieu à des avis défavorables, dont 116 dans les transports publics et 5 dans la police.

Le rapport souligne également la difficulté de se séparer d'un agent identifié comme radicalisé. Si celui-ci conteste son licenciement en justice, le tribunal n'a en général pas accès aux informations prouvant sa culpabilité, que les services de renseignements rechignent à partager. Le rapport évoque l'idée d'autoriser les services à ne donner leurs informations qu'au juge, et pas aux autres parties.

"On est conscient que ces mesures peuvent apparaître comme liberticides", affirme Eric Poulliat. "Mais dans des métiers qui concernent notre jeunesse, on peut mettre le sujet sur la table", estime-t-il.

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