Photos d'exactions de l'EI sur Twitter : amende requise contre Marine Le Pen

Auteur:
 
Par Clara WRIGHT - Nanterre (AFP)
Publié le 10 février 2021 - 16:58
Image
Croquis d'audience du 10 février 2021 représentant la présidente du RN Marine Le Pen devant le tribunal correctionnel de Nanterre, qui la juge pour avoir diffusé des photos d'exactions de l'Etat islam
Crédits
© Benoit PEYRUCQ / AFP
Croquis d'audience du 10 février 2021 représentant la présidente du RN Marine Le Pen devant le tribunal correctionnel de Nanterre, qui la juge pour avoir diffusé des photos d'exact
© Benoit PEYRUCQ / AFP

Le parquet de Nanterre a requis mercredi 5.000 euros d'amende contre Marine Le Pen et Gilbert Collard pour avoir diffusé des photos d'exactions du groupe Etat islamique (EI) sur les réseaux sociaux en 2015, des poursuites jugées "politiques" par les deux élus du Rassemblement national.

Ces responsables politiques comparaissaient devant le tribunal correctionnel pour diffusion de messages violents ou portant gravement atteinte à la dignité humaine, susceptibles d'être vus par un mineur.

Cette infraction est passible de trois ans de prison et 75.000 euros d'amende.

Avant l'audience, Marine Le Pen avait considéré devant la presse qu'il s'agissait d'un "procès politique" contre son mouvement, et assuré qu'elle "republierait" ces images si c'était à refaire.

Devant le tribunal, elle a invoqué la "liberté d'expression et d'information".

Les deux élus "avaient parfaitement le droit de diffuser ces images, le problème est de s'assurer, avant la diffusion, qu'aucun mineur n'est susceptible de voir ou de percevoir ces images", a expliqué de son côté le procureur Jean-Pascal Oualid dans son réquisitoire.

"Est-ce qu'il y a un bouton rouge +spécial mineurs+ sur lequel appuyer ?", a ironisé en réponse Me Rodolphe Bosselut, l'avocat de Marine Le Pen. Ce sont "des photos de notoriété publique, à la disposition de tous, et sans doute des mineurs, sans que Marine Le Pen ait besoin de les retweeter", a-t-il plaidé, demandant la relaxe.

- "Réalité des crimes" -

En cause: des tweets publiés en décembre 2015, quelques semaines à peine après les attentats revendiqués par l'EI à Paris et en Seine-Saint-Denis.

Dans une France traumatisée par les attentats, Marine Le Pen avait relayé trois photos d'exactions du groupe jihadiste. Elle y avait ajouté les mots: "Daesh, c'est ça!", en réponse au journaliste Jean-Jacques Bourdin qu'elle accusait d'avoir "comparé" l'EI et le Front national lors d'une émission.

M. Bourdin "a fait une comparaison entre le RN (ex Front national) et Daesh en disant qu'il y a une +communauté d'esprit+ entre le RN et Daesh", a déclaré Marine Le Pen, dénonçant "une banalisation et une minorisation inadmissible des crimes contre l'humanité (...) qui sont le fait de ce gang d'assassins prénommé Daech".

"J'ai donc rappelé directement sur Twitter M. Bourdin à la raison par deux tweets", a-t-elle déclaré. Les photos montraient un soldat syrien écrasé vivant sous les chenilles d'un char, un pilote jordanien brûlé vif dans une cage et le corps décapité du journaliste américain James Foley, la tête posée sur le dos.

"C'est la réalité de la barbarie, on peut faire la politique de l'autruche, mais ces images avec leur violence nous mettaient en face de la réalité du crime et rappelait la stupidité de la comparaison faite" par M. Bourdin, a plaidé Me Dassa, autre conseil de Marine Le Pen.

Gilbert Collard, alors député du Gard, avait relayé le même jour sur ses comptes Facebook et Twitter la photo d'un homme gisant au sol, le crâne défoncé, avec ce commentaire: "Bourdin compare le FN à Daesh: le poids des mots et le choc des bobos!".

Des photographies "non floutées" et "toutes issues de la propagande de l'Etat islamique", a souligné la présidente de la chambre, Isabelle Pulver.

- "protection des mineurs" -

Le procureur a fait valoir que le parquet était constitué de magistrats "garants des libertés individuelles" mais que la loi "instaure une limite à la liberté d'expression, adaptée et proportionnée à l'objectif qui est la protection des mineurs".

"Estimez-vous que ces photos portent atteinte à la dignité humaine ?", a demandé la présidente aux prévenus.

"C'est le crime qui porte atteinte à la dignité humaine, ce n'est pas sa reproduction photographique", a lancé l'ancienne avocate Marine Le Pen, se défendant, comme dans une arène politique, en s'adressant à la présidente mais aussi aux journalistes.

"Aviez-vous conscience qu'un public mineur était susceptible de voir" ces tweets?, a repris la présidente.

"Je n'ai véritablement pas pensé à ça. J'ai pensé à la liberté qui est la mienne d'expression et d'information", a répondu Marine Le Pen.

Le tribunal a mis son jugement en délibéré pour le 4 mai.

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
bayrou
François Bayrou, baladin un jour, renaissant toujours
PORTRAIT CRACHE - François Bayrou, député, maire de Pau et plusieurs fois ministres, est surtout figure d’une opposition opportuniste. Éternel candidat malheureux à la...
20 avril 2024 - 10:45
Politique
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.