En Argentine, la crise du peso se transforme en aubaine pour les touristes

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Par Jordane BERTRAND - Buenos Aires (AFP)
Publié le 15 septembre 2018 - 08:45
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Un touriste déjeune d'une saucisse, lors d'une visite dans le quartier traditionnel de La Boca à Buenos Aires, le 14 septembre 2018
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© Eitan ABRAMOVICH / AFP
Un touriste déjeune d'une saucisse, lors d'une visite dans le quartier traditionnel de La Boca à Buenos Aires, le 14 septembre 2018
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"En dix jours, nous avons dépensé moins que nous pensions" : à Buenos Aires, si la dépréciation du peso face au dollar a franchement entamé le pouvoir d'achat des Argentins, les touristes se frottent les mains, avec des vacances bien moins chères que prévu.

Pedro Pereira de Azevedo, un avocat brésilien de Belo Horizonte, dans l'est du Brésil, profite d'une dernière soirée dans la capitale argentine avec sa femme et ses trois enfants. Pour lui, ce premier séjour à Buenos Aires s'est révélé plus avantageux qu'annoncé.

"Nous avions prévu un budget de 7.000 reais (1.500 euros), nous n'en avons finalement dépensé qu'entre 3.000 et 3.500", constate le père de famille à l'heure des dernières photos souvenir devant la Casa Rosada, le palais présidentiel argentin.

Et pour cause, à leur arrivée le 5 septembre, le peso venait de dévisser en quelques jours de 20% par rapport au dollar (50% depuis le début de l'année). Et si le réal brésilien a lui-même subi quelques secousses, il a mieux résisté.

"Nous avons pu acheter tout ce que nous voulions, visiter tous les sites touristiques de Buenos Aires", se réjouit le Brésilien. "Au stade Boca Juniors, nous avons même fait la visite VIP !", soit deux fois le prix standard, s'enthousiasme une de ses filles.

Non loin du stade mythique du quartier populaire de La Boca, Lori Berhow, une Américaine qui habite au Chili, et profite de quelques jours de vacances à Buenos Aires avec son frère, reconnaît être chanceuse de pouvoir bénéficier d'un change si "favorable".

"Hier, au restaurant, nous avons profité d'un repas complet pour 60 dollars pour deux, d'habitude cela aurait été plutôt 100 dollars", explique-t-elle.

Même bonne surprise pour Pauline Gauthier, une jeune touriste française qui arpente les rues du quartier historique de San Telmo avec son compagnon. "Quand on lit les guides touristiques, il est écrit que les prix en Argentine sont plus élevés qu'ailleurs en Amérique latine. Mais finalement, depuis dix jours nous avons dépensé moins que ce que nous pensions", raconte-t-elle.

- "Tout est le double" -

Pour les Argentins, réputés grands voyageurs, la situation est évidemment toute autre.

Romina Valenzisi, une juriste argentine de 34 ans, doit partir prochainement pour quinze jours de vacances prévues de longue date en Espagne et en Italie.

Il y a six mois, elle a acheté son billet d'avion en six "cuotas", c'est-à-dire un étalement du prix sur six mois sans frais, selon une forme de paiement très commune pour de nombreux produits en Argentine afin d'amortir les effets de l'inflation (45% annoncés en 2018).

Mais pour le logement et l'alimentation, avec un dollar passé de 18 pesos en janvier à environ 38 pesos en septembre, son budget sur place risque d'exploser. "Je dois maintenant payer les hôtels, et tout est le double, cela sort de mon budget", s'alarme-t-elle. "Je sais déjà que je dépenserai moins d'argent, je ferai moins d'achats".

"Nos ventes pour les voyages à l'étranger ont baissé de 25 à 30% ces dernières semaines", confirme Vincent Chevalier, propriétaire français de l'agence de voyages Equinoxe, à Buenos Aires depuis 28 ans. "Et la crise commence aussi à affecter le tourisme intérieur", souligne-t-il.

Gonzalo Sastre, propriétaire d'un hôtel, dans le centre de la capitale, relève également une baisse des réservations de ses compatriotes : "quand le peso avait un niveau +normal+, nous travaillions bien avec les locaux en semaine, essentiellement des gens qui venaient pour le travail. Aujourd'hui, les entreprises envoient moins de gens".

Mais son hôtel affiche complet pour les deux semaines à venir, grâce à l'arrivée de Brésiliens. Car "dans la région, il y a un tourisme très opportuniste lié à la baisse de la monnaie", explique Vincent Chevalier.

A l'inverse, la baisse du pouvoir d'achat des Argentins fait craindre aux opérateurs touristiques des pays voisins, en particulier au Chili et en Uruguay, une chute du nombre de visiteurs.

En Uruguay, où les Argentins se rendent en masse durant l'été austral (janvier-février), le gouvernement a d'ores et déjà annoncé la réintroduction d'une exemption de la TVA (22%) pour séduire les touristes venant de l'autre rive du Rio de la Plata.

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