« Les hôtels-restaurants haut de gamme sont particulièrement impactés par la crise sanitaire »

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Corine Moriou pour FranceSoir
Publié le 26 octobre 2020 - 12:48
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Guillaume Dépée
« Le restaurant ne ferme pas à 21 heures pour les résidents de l’hôtel qui y dînent. Ils sont ici comme à la maison ! »
Guillaume Dépée

Perte de clients, de chiffre d’affaires et d’emplois, L’auberge des Templiers, un Relais & Châteaux situé aux portes de la Sologne, paye cher la note de la COVID-19. Son propriétaire, Guillaume Dépée, trouve des solutions au couvre-feu avec une offre originale tandis que d’autres mettent la clé sous la porte.

 

Crise sanitaire oblige : L’Auberge des Templiers n’est plus ouverte que le vendredi, samedi et dimanche midi au lieu des cinq jours et demi habituels. L’équipe, composée de 40 salariés, est désormais passée à 33 personnes sans recours au licenciement. Le chiffre d’affaires est en berne avec une prévision de moins 50 % sur l’année 2020. « Après le confinement, nous avons perdu les grandes tablées familiales avec notamment des personnes âgées. Les séminaires et les groupes de chasseurs ont déserté. Les Parisiens qui aiment séjourner ici pendant un week-end sont moins nombreux. Nos clients étrangers qui représentent 40 % de notre clientèle -avec un ticket moyen de 30% supérieur à la moyenne -ne sont pas venus cette année », détaille Guillaume Dépée, le représentant de la 3ème génération d’une affaire familiale fondée par ses grands-parents en 1945.

Les 5C, piliers des Relais & Châteaux

L’Auberge des Templiers, un ancien relais de poste du XVIII ème siècle, se déploie sur un parc magnifique de chênes pluri-centenaires, en lisière de forêt, à Boismorand, dans le Loiret. Son restaurant, une étoile au Michelin, est réputé dans toute la région grâce au talent de Martin Simonart, un jeune chef belge, adepte d’une cuisine du terroir créative et épurée. Il pourrait bien accrocher une deuxième étoile au Michelin. Cet établissement cinq étoiles est membre de l’association Relais & Châteaux qui regroupe 560 établissements indépendants à travers le monde. On y retrouve les fameux 5C qui caractérisent ce club fermé : charme, courtoisie, calme, cuisine, caractère. Les clients viennent dans un Relais & Châteaux pour vivre une expérience, se détendre dans une ambiance slow life. « Notre restaurant étoilé n’est pas rentable en lui-même. C’est l’hôtel qui nous permet de maintenir le restaurant gastronomique, explique Guillaume Dépée, fils de Françoise et Philippe, qui a repris le flambeau il y a 5 ans. Nous achetons des produits locaux de qualité à des producteurs qui ne peuvent baisser leurs prix. Dès lors que nous dressons une table, le coût est de 30 euros hors taxes avant même d’avoir servi un verre d’eau. Lorsque je suis découragé, je me dis que je pourrais vendre le domaine à un investisseur qui en ferait un EHPAD de luxe. Mais c’est une affaire familiale et, mes frères, sœurs et moi-même y sommes très attachés. »

Burgers et pizzas tirent leur épingle du jeu

Face à la crise du coronavirus, la restauration rapide - burgers et pizzas - et les ventes à emporter semblent mieux tirer leur épingle du jeu que les autres acteurs du secteur de l’hôtellerie-restauration, comme l’indiquent de nombreuses études. « Les hôtels-restaurants haut de gamme sont particulièrement impactés par la crise sanitaire. Nous dépendons beaucoup du tourisme. Certains doivent fermer leur restaurant ou cesser définitivement leur activité, observe Guillaume Dépée. A L’Auberge des Templiers, nous n’avons pas à rembourser des emprunts ou à payer un loyer, c’est ce qui nous sauve. Mais nous ne sommes pas riches pour autant, nous avons du personnel et des charges élevées ! Malgré les mesures de chômage partiel, les allègements de charges de l’Urssaf, la situation financière n’est pas brillante. J’ai demandé une baisse et un échelonnement de la taxe foncière qui est de 35 000 euros. Ma demande a été refusée par le maire. J’ai bien conscience que L’Auberge des Templiers, principal employeur du village de Boismorand, est une ressource importante, mais j’aurais apprécié être entendu. »

Offre spéciale couvre-feu, dîner et hébergement compris

Suite aux annonces du Premier ministre, Jean Castex, 54 départements et 46 millions d’habitants sont soumis au couvre-feu depuis le samedi 24 octobre, à partir de 21 heures jusqu’à 6 heures du matin. Dans la région Centre-Val de Loire, Le Cher, L’Eure-et-Loir, L’Indre et le Loir-et-Cher y échappent pour le moment. Le couvre-feu est imposé dans le Loiret et en Indre-et-Loire. Une inégalité et une distorsion de concurrence que n’apprécient pas les principaux intéressés. « Il suffit de traverser un pont et l’on n’est plus concerné par le couvre-feu », fait remarquer un élu.   

Guillaume Dépée a réagi très vite. « Grâce à l’intervention du maire de Montargis, j’ai obtenu une autorisation dérogatoire de la préfecture afin de ne pas fermer le restaurant à 21 heures pour les résidents de l’hôtel qui y dînent. Nous sommes en pleine campagne et nos clients ne quittent jamais l’établissement après le repas du soir. Ils sont ici comme à la maison ! En revanche, notre bar reste fermé pour trois semaines minimum. » Imagination, réactivité, capacité d’adaptation distinguent l’Auberge des Templiers.

Sur le site du Relais & Châteaux https://www.lestempliers.com/fr/, on découvre deux offres promotionnelles. Ainsi, l’offre spéciale couvre-feu week-end et jours fériés propose un menu dégustation à 145 euros par personne et la possibilité de profiter d’une chambre à 50 euros ou une Suite à 100 euros. En semaine, le prix de l’hébergement est inférieur avec une chambre bradée à 30 euros. Du jamais vu !

Gastronomie dès 18 heures

Mais qu’en est-il pour la clientèle locale qui a ses habitudes à l’Auberge des Templiers ? Des journalistes de France 3 ont interviewé Martin Simonart, le Chef et bras droit de Guillaume Dépée. Il explique la réorganisation des équipes :

« Désormais, le service commence à 18 heures et le personnel doit faire la journée continue. Dans un restaurant gastronomique, les clients peuvent quitter la table vers 15/16 heures. Il faut faire le ménage, dresser les tables avec un nouveau nappage pour le dîner de 18 heures. Bien entendu, on ne peut plus faire de menu dégustation avec 12 plats ! » Bref, c’est le grand chambardement, mais le personnel est soudé et fait son maximum pour satisfaire la clientèle. A 18 heures, la carte avec deux ou trois plats n’impose pas une course contre la montre. Prenons exemple sur nos amis Anglais qui dînent tôt ! Pour les inconditionnels des grandes dégustations, les réservations vont-elles basculer sur les déjeuners ? Il est encore trop tôt pour le dire.  

 

Auberge des Templiers - 20 route départementale 2007 - 45 290 Boismorand

 

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