Accident de Puisseguin : un an après, le mystère et des survivants traumatisés

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La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 22 octobre 2016 - 14:29
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Puisseguin Accident Car Vue Aérienne2
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©Régis Duvignau/Reuters
L'embrasement reste toujours inexpliqué malgré quelques pistes.
©Régis Duvignau/Reuters
Le 23 octobre 2015, un accident de la circulation impliquant un car de retraités et un camion se transformera en brasier mortel pour 43 personnes. Les rares survivants attendent toujours des réponses sur les causes de l'accident, que les enquêteurs peinent à éclaircir.

"Un petit choc... de rien du tout", selon une rescapée. Un an après l'accident d'autocar de Puisseguin (43 morts), proches et victimes cherchent toujours à comprendre l'embrasement soudain qui a transformé une simple collision avec un camion en drame.

Ce vendredi 23 octobre 2015, le jour n'était pas levé, mais l'obscurité s'estompait. Sur la D17, le virage serré était connu, limité à 90 km/h, mais sans lourd passé d'accidents. La chaussée humide, mais il ne pleuvait pas. Pourtant, vers 07H30, un semi-remorque arrivant à 75 km/h se déporte sur la gauche au sortir du village de Puisseguin (Gironde), se met en portefeuille, percute un car de retraités partis en excursion, venant en sens inverse.

"S'il n'y avait eu que le choc, il n'y aurait pas de victime", assure un autre rescapé, Raymond Silvestrini. "Juste de la tôle froissée". C'est ce que souffla aussitôt le chauffeur du car, dans un bref "instant de soulagement général" dans le car, avant de décoincer ses jambes, puis d'ouvrir les portes et d'aider des passagers, gestes qui sauveront des vies, raconte Me Marie Mescam, avocate de 140 victimes et proches.

Mais, après quelques dizaines de secondes, c'est l'enfer. Des flammes surgissent autour du car, qui s'embrase "comme un éclair", piège de fumées toxiques brûlantes, dont ne pourront s'extraire que huit personnes, sur 49 occupants. Dans le camion, le routier de 31 ans et son garçon de trois ans à ses côtés périront aussi dans les flammes.

C'est le deuxième accident de la route le plus meurtrier en France après celui de Beaune (Côte-d'Or) en 1982, dans lequel avaient péri 53 personnes, pour la plupart des enfants.

Un an après, le virage a été réasphalté, la signalisation indique toujours un virage serré, limité à 90 km/h. Un panneau interdit de s'arrêter sur les lieux de l'accident, "mais cela n'empêche pas les gens de venir déposer des fleurs, il y en a eu tout le temps", relève Xavier Sublett, maire de Puisseguin.

Dimanche, sur une aire de pique-nique avec vue sur le virage, sera inaugurée une stèle avec les noms des victimes, en présence d'environ 150 proches. Une autre stèle sera dévoilée à Petit-Palais-et-Cornemps, à 8 km, d'où partit le club du 3e âge ce matin-là.

"Beaucoup restent très marqués, encore plus à l'approche de l'anniversaire. Et puis il y en a... je ne vois juste pas comment ils pourront s'en remettre", confie Michel Vigier, enseignant retraité au verbe doux et précis, à la tête du Collectif des victimes. "Ce n'est pas tant le fait que des personnes âgées meurent, ce sont les conditions de leur mort qui ont traumatisé", insiste-t-il. Et bien sûr les rescapés. "Ils ne comprennent pas pourquoi eux se sont échappés de ce fichu car, alors que l'amie, assise à une place qui paraissait meilleure, est restée dedans...".

"La question cruciale, c'est celle de la rapide propagation de l'incendie. Or, jusqu'à présent, on a eu des explications un peu évasives", estime à l'AFP Raymond Silvestrini, 69 ans, qui n'a eu la vie sauve qu'en se défenestrant (quatre vertèbres fracturées) du car où a péri sa compagne.

Les expertises incendie, véhicule, revêtement, accidentologie ont levé des pistes: une vitesse du camion légale mais inadéquate, une déficience du freinage de la remorque, un réservoir additionnel du camion transpercé sous le choc, un nuage de goutelettes de gasoil enflammé au contact de parties chaudes, un possible appel d'air par les vitres brisées.

Mais l'enchaînement causal précis de l'embrasement? Le rôle éventuel de gaz de climatisation, le comportement réel du réservoir? "Pas de certitudes", résument les avocats, qui vont présenter des demandes de compléments d'enquête. "Les enquêtes de cette ampleur-là, cela prend en général au minimum quatre ans. Les victimes l'ont intégré", pose Me Mescam.

Pour autant, avec 12 à 13 millions d'euros déjà versés, la quasi-totalité des 400 victimes indemnisées -des expertises de stress post-traumatique restent en cours- des préjudices spécifiques reconnus à l'amiable, le suivi et la prise en charge ont été salués par le Collectif, comme par les avocats. Le "cas Puisseguin" est d'ailleurs cité en exemple dans un "Livre blanc des avocats" sur les préjudices des attentats, que doit remettre le 7 novembre le Barreau de Paris à Juliette Méadel, secrétaire d'Etat à l'Aide aux victimes.

A Puisseguin, "il y a vraiment eu un élan, une vive impulsion de l'Etat, un dialogue collectif direct avec les assureurs. C'est assez rare pour être salué", résumé Me Mescam. Qui relève que les "indemnisations obtenues pour Puisseguin sont sensiblement plus importantes que celles actuellement proposées aux victimes des attentats du 13 novembre" à Paris, dont elle défend plusieurs cas.

 

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