Déficit sous les 3% : le quinquennat Hollande réhabilité ?

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Pierre Plottu
Publié le 26 mars 2018 - 19:15
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François Hollande, le 21 juillet 2017 à Arles
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© BERTRAND LANGLOIS / AFP
Emmanuel Macron doit, en partie, à François Hollande des finances publiques assainies?
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Le déficit public de la France est retombé sous la barre des 3% du PIB, pour la première fois depuis 2007, a annoncé ce lundi l'Insee. Et si cette bonne nouvelle, revendiquée par les troupes d'Emmanuel Macron, était avant tout la victoire de François Hollande?

François Hollande le mal-aimé va-t-il être réhabilité par ce "temps long" qu'il a toujours loué? Au plus bas dans les sondages tout au long de son quinquennat, empêché de se présenter à sa propre succession pour cause d'impopularité, l'ancien président a largement souffert de son manque de résultats sur le chômage ou la croissance notamment.

Ce lundi 26, l'annonce par l'Insee d'un déficit public bien inférieur à ce qui était prévu a surpris les observateurs. Pour la première fois depuis 2007, la France repasse ainsi sous la barre des 3% du PIB et se remet en conformité avec les règles européennes. Si cela était attendu, avec une prévision de 2,9%, il faut noter une vraie bonne nouvelle d'autant que l'économie tricolore partait de loin avec un déficit s'élevant à 3,4% en cumulant les budgets de l'Etat, des collectivités et de la Sécurité sociale en 2016. Soit 0,8 point de gagné en un seul exercice, une "broutille" de quelque 20 milliards d'euros.

Dans le détail, l'institut statistique souligne la bonne santé globale de l'économie du pays pour expliquer cette performance. Le retour de la croissance (2% en 2017 contre 1,2% en 2016) ainsi que la bonne tenue du budget de l'Etat -à noter pour une année électorale- ou encore un déficit de la Sécu au plus bas "depuis 15 ans" sont soulignés. La reprise de la croissance surtout permet un surplus de collectes fiscales, et notamment de TVA (+7,6 milliards d'euros), compensant la hausse des dépenses publiques due notamment à la reprise des investissements des collectivités territoriales (+2,2 milliards d'euros).

Lire - Réduction du déficit: il "reste un chemin important à faire" selon Le Maire

Mais quel rapport avec François Hollande? Tout d'abord une certaine prudence de l'ancien chef de l'Etat, qui avait bâti son budget 2017 sur une prévision de croissance de 1,5%, avant de la réviser à 1,7%. Et si le réalisé final de 2% peut être à mettre au crédit d'Emmanuel Macron dont l'élection aurait provoqué un "choc de confiance" -d'aucuns répondront que ce sont les vainqueurs qui écrivent l'histoire...- la remise en état des finances de l'Etat et de la Sécu, surtout, sont bien à mettre au crédit de son prédécesseur.

L'équilibre du budget de la Sécurité sociale, en déficit depuis 2002 et qui affichait un creusement de son "trou" de 13,3 milliards en 2012 (après un pic à 23,9 milliards en 2010), s'est ainsi amélioré de 7,3 milliards entre 2016 et 2017. Celui de l'Etat, en parallèle, s'est réduit de 9,5 milliards d'euros sur la même période et ce, donc, malgré une hausse des investissements des collectivités. Le tout dans un contexte économique morose et alors qu'il a fallu notamment absorber les 40 milliards de baisse des charges des entreprises.

Bruno Le Maire a donc beau jeu de s'approprier cette performance en arguant que cette performance est le résultat de "décisions courageuses sur la dépense publique" de son gouvernement en citant le coup de rabot sur les APL. Le ministre de l'Economie feint d'oublier que la mesure, si elle a eu un fort impact sur l'opinion, n'a pris effet qu'en octobre dernier et ne portait que sur une baisse uniforme de 5€ pour tous les bénéficiaires. A l'arrivée une économie de 97,5 millions d'euros pour le budget de l'Etat en 2017, soit à peine plus de 1% des 9,5 milliards de baisse du déficit...

Attention toutefois, la gestion des déficits par François Hollande et son gouvernement n'est pas exempte de tous reproches. La Cour des comptes a ainsi épinglé en juin dernier "l'insincérité" du dernier budget de l'ex-locataire de l'Elysée, qui aurait sous-estimé les dépenses (et principalement pour la recapitalisation d'Areva) pour embellir son bilan. Les sages de la rue de Cambon alertaient sur un possible dérapage du déficit en 2017, qu'ils estimaient autour de 3,2%, pour un résultat que l'on connait désormais.

A lire: La Cour des comptes critique le dernier budget de François Hollande

Autre limite plus consistante: le taux de prélèvements obligatoires qui atteint 45,4% du PIB pour 2017. Un niveau historiquement haut (source Insee), et qui, bien que comparable à ce qui se fait en Belgique et au Danemark, n'en entraîne pas moins un ras-le-bol fiscal certain qui limite d'autant la marge de manœuvre d'Emmanuel Macron sur ce levier classique pour réduire les déficits.

Pour éviter de recourir à un autre outil, tout aussi classique et générateur de mécontentement, qui consiste à réduire la dépense en rognant sur la couverture sociale, Emmanuel Macron devra marcher sur un fil. Il s'agit ainsi de s'appuyer sur les bases assainies -sans être parfaites- que lui a laissé son prédécesseur pour faire décoller réellement l'économie et ainsi créer une richesse qu'il pourra redistribuer sans pour autant creuser les déficits, ni rogner sur l'Etat providence. Si c'est toutefois bien là son objectif.

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