Covid-19 : les meetings de campagne présidentielle seront-ils interdits ?

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FranceSoir
Publié le 10 décembre 2021 - 18:45
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ARA, pour FranceSoir
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« C’est une machine à cluster ! » a martelé ce lundi Gilles Pialoux, chef du service des maladies infectieuses et tropicales de l’hôpital Tenon à Paris. Pour autant, les meetings politiques ne seront pas interdits. En vertu d’une décision rendue en mai dernier par le Conseil constitutionnel, activités politiques, syndicales et cultuelles sont dispensées d’une obligation de recours au passe sanitaire. Une jurisprudence confirmée le 9 novembre par les Sages, saisis sur la loi de vigilance sanitaire : « La présentation du passe sanitaire ne peut être exigée pour l’accès aux bureaux de vote ou à des réunions et activités politiques ».

Si l’État ne peut donc imposer le passe sanitaire pour les réunions politiques sans risquer de verser dans l’illégalité, l’organisateur de l’évènement est libre de le demander ou non. Le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, a signifié à l’issue du Conseil des ministres le 24 novembre dernier que « rien n’empêche un organisateur d’une réunion politique d’exiger le passe sanitaire pour y accéder ».

Toutefois, exiger est un bien grand mot, car il ne peut y avoir aucune répercussion en cas de refus. Patrick Kanner, le président du groupe socialiste, écologique et républicain du Sénat, précise à Public Sénat : « On peut le demander, on ne peut pas l’exiger. La question posée est simple : si quelqu’un n’a pas de passe sanitaire, que fait-on ? On ne peut pas empêcher une personne de rentrer ».

Dans l'éventualité où l'accès à un meeting politique serait refusée aux personnes sans passe, le Conseil constitutionnel prévoit que les mesures pourront « faire l’objet notamment d’un référé-liberté de nature à assurer le respect par le pouvoir réglementaire du droit d’expression collective des idées et des opinions ». C'est pourquoi le sénateur de Haute-Savoie, Loïc Hervé, fervant opposant au passe sanitaire, a appelé vendredi au respect de cette décision constitutionnelle : « Il serait tout à fait appréciable que les ministres et les préfets sans parler des procureurs veillent à l’application de cette partie de la loi qui constitue une des seules garanties de protection des libertés individuelles ».

Face aux règles sanitaires, les différents candidats à la présidentielle ont adopté des attitudes diverses.

Différents candidats, différentes approches

Dimanche 5 décembre, Jean-Luc Mélenchon et Éric Zemmour ont donné rendez-vous à leurs sympathisants ; aucun passe sanitaire demandé à l’entrée, en contrepartie du port du masque. S’agissant du rassemblement qui a marqué le coup d’envoi de la campagne de Florian Philippot le 24 octobre dernier à Aubervilliers, sans surprise, ni passe ni masque n'ont été exigés.

À l’inverse, le 29 novembre, sans masque et sans passe, il était impossible de se joindre aux macronistes à la Mutualité à Paris, pour le premier meeting d’Ensemble Citoyens. Une soirée sans Emmanuel Macron, qui avait néanmoins des allures de lancement de campagne.

Côté LR, « il n'est pas question de faire de meeting sans passe sanitaire », a annoncé Valérie Pécresse le 2 décembre sur le plateau de BFMTV. Chez Les Républicains, on n’hésite pas à aller jusqu’à renoncer au premier meeting prévu le samedi 11 décembre à Paris. « Je ne peux pas prendre de risques avec la santé de nos sympathisants », affirme sur France Inter ce 6 décembre la candidate fraichement investie, non sans en profiter pour adresser une pique à l’endroit de ses adversaires : « Ce n’est pas une démonstration de force que de contaminer les Français. » Le lancement de campagne se fera donc en visioconférence, d’après Public Sénat.

Dans le camp écologiste, c’est encore l’hésitation. Pour leur premier rassemblement public organisé à Laon ce 11 décembre, le contrôle du passe n’était pas prévu, rapporte Le Point. « La décision n’est pas encore prise, car la réglementation est un peu floue. Pour nos journées d’été, on nous avait interdit de le demander. Notre esprit, c’est de suivre la règle, rien que la règle », expliquait Marine Tondelier, porte-parole du candidat Yannick Jadot. Mais selon LCI, la réunion se fera finalement en jauge réduite avec une centaine de personnes et le passe ne sera pas exigé. Les autres intéressés pourront y assister par visioconférence.

Enfin, pour Anne Hidalgo, qui maintient son premier grand meeting de campagne à Perpignan, il faudra se munir du fameux sésame à l’entrée, et s'équiper de son masque à l’intérieur pour pouvoir être assis sur l’un des 1 000 sièges.

Quid des jauges sanitaires ?

In fine, une question reste en suspens : des jauges dans les établissements recevant du public seront-elles rétablies dans les semaines à venir ? Si les bons élèves d'EELV prennent de l'avance en appliquant volontairement cette mesure pour leur meeting, c'est une éventualité qui se profile pour janvier, un mois crucial pour les campagnes présidentielles. Ce qui a de quoi tracasser les esprits : « Une campagne sans meeting, c’est une campagne dégradée en termes démocratiques, et qui ne sert qu’une personne : Emmanuel Macron », appréhende le chef de file des socialistes au Sénat, Patrick Kanner.

L'actuel président de la République ne serait peut-être pas le seul à bénéficier de cette restriction. Sur Twitter, après l'annonce de l'annulation du premier grand meeting de campagne de Valérie Pécresse en raison du Covid-19, un internaute soupçonne un tout autre motif : « Ou peut être la trouille de n'avoir que 300 participants quand Zemmour en regroupe 15 000 ? ». Citant ce tweet, l'avocat Maitre Di Vizio renchérit : « Vous avez compris pourquoi ils veulent imposer le passe sanitaire ? Pour n'avoir personne et dire c'est la faute de l'épidémie. » 

En effet, il est difficile de ne pas repenser à l'enquête vidéo de Mediapart sur le "meeting fantoche de Valérie Pécresse" à l'occasion du coup d'envoi fondateur de son parti Libres !, à Brive-la-Gaillarde en août 2019. L'audience de 1 500 personnes s'avérait être composée de groupes entiers de faux militants acheminés depuis Paris et issus d’associations communautaires. Certaines d'entre elles sont même financées par la région Île-de-France... dont elle est à la tête.

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